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Nicolas Wadimoff • Réalisateur

“J’y retourne toujours”

par 

Cineuropa : Depuis Les gants d'or d'Akka (1992), votre parcours de réalisateur et de producteur croise ponctuellement celui de la Palestine. Comment expliquez-vous une telle constance?
Nicolas Wadimoff : Chaque fois que j’y vais, je me dis que c’est la dernière fois, mais comme si ça me collait à la peau, j’y retourne toujours. Cela rejoint aussi mon goût pour les questions d’identité, d’origine et d’exil sans doute en relation avec mes origines mélangées.

Vous avez travaillé avec Béatrice Guelpa, avec laquelle vous aviez réalisé L’accord (2005). Pouvez-vous préciser la nature de cette collaboration?
Elle est journaliste et écrivain et son approche humaine m’intéresse beaucoup. Pour Aisheen (Chroniques de Gaza) [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Nicolas Wadimoff
fiche film
]
, nous avons cherché les protagonistes du film ensemble, préparé le terrain pour tourner et beaucoup échangé sur place.

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Comment avez-vous réussi à entrer dans Gaza avec une caméra en février 2009, juste après l’opération militaire israélienne?
Grâce au soutien de la Télévision suisse romande, j’ai pu tourner 14 jours à Gaza. C’est beaucoup en regard des autorisations habituelles, mais bien peu pour un long métrage documentaire. Nous ne devions pas perdre une minute! A cet égard, le travail d’équipe avec Béatrice Guelpa et le chef opérateur Frank Rabel a été capital.

Dans un champ de ruines que l’armée israélienne continue régulièrement à frapper, vous déambulez dans Gaza sans donner la parole à des dirigeants. Pourquoi ce choix?
Plutôt que les officiels, nous sommes allés voir tous ceux qui tentent de recoller les bouts épars de leur existence. Mais si nous avions vu une scène intéressante avec quelqu’un du Hamas, je l’aurais filmée.

Quand vous filmez l’interview de rappeurs par une radio indépendante islamiste, l’emprise du Hamas sur la société gazaouie transparaît nettement. Leur liberté d’expression est-elle le reflet des aspirations profondes de la population?
Dans cette séquence, on perçoit le contrôle social absolu qu’exerce le Hamas – qui n’est pas la tendance la plus radicale à Gaza – et ce groupe de rap ose dire tout haut ce que les gens pensent tout bas. En novembre, nous avons organisé trois projections du film à Gaza. Les rappeurs et des gens du Hamas sont venus et tous ont participé aux discussions. Le débat est encore possible lorsque les conditions sont réunies, en l’occurrence autour d’un événement précis, la projection d’un film. Mais ces possibilités de discussion sont extrêmement rares.

Le film s’ouvre sur les images d’un parc d’attraction détruit. Vous filmez les symboles de l’insouciance et de l’émerveillement – un zoo, des clowns – qui ont été décapités par la guerre. Le rêve est plus fort que la guerre?
Je me suis très vite rendu compte que le film serait du côté des vivants. Le choix s’est fait quand j’ai perçu cette dynamique universelle: l’envie de se reconstruire après les pires catastrophes. Du coup, nous sommes allés vers les lieux de vie presque banals ailleurs et qui, là-bas, deviennent incroyables.

Vous montrez aussi une famille dont les champs d’olivier sont anéantis. Que s’est-il passé?
Ici, c’est l’invasion terrestre. C’est indéfendable et j’espère que la séquence le dit assez. Dans le film, on pose la question: Cela valait-il la peine d’anéantir ce champ d’oliviers dont certains arbres datent de plusieurs centaines d’années?

L’espoir est-il plus vivace chez les jeunes?
Les gens plus âgés en sont à leur deuxième ou leur troisième guerre, ils ont une certaine résignation. Alors que les nouvelles générations ont l’énergie folle de la jeunesse.

Aisheen [still alive in Gaza] a reçu le Prix du jury œcuménique au Festival de Berlin. A-t-il déclenché des réactions de la part du gouvernement israélien?
Non, pas du tout. Nous avons même été invités à Tel-Aviv par la Cinémathèque pour des projections spéciales. Certains Israéliens que je connais seront emballés qu’on montre le film là-bas et qu’on puisse en discuter après.

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