Dana Nechushtan • Réalisatrice
"Elles ont besoin l’une de l’autre pour rester fidèles à elles-mêmes"
par Boyd van Hoeij
Dunya & Desie [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film], conte
coloré sur une amitié entre deux filles, l’une hollandaise et l’autre
marocaine, est basé sur une série télévisée populaire et sera
présenté dans a section Europe: Now! du Festival de Karlovy Vary.
Cineuropa : En quoi le développement des personnages de Dunya et
Desie a-t-il évolué entre la série télévisée et le film ?
Dana Nechushtan : Dans nombre de séries télévisées, il est
important que les personnages se développent lentement ou pas du
tout, afin de donner aux spectateurs l’opportunité d'apprendre à les
connaître petit à petit. C’est le cas de notre série. Dans un film,
le développement des personnages est au contraire très important :
il faut que nos personnages aient appris quelque chose dans les 90
minutes dont on dispose. Ils faut qu'ils aient en quelque sorte
progressé en tant qu'êtres humains. Le scénariste Robert Alberdingk
Thijm et moi savions que nous voulions qu'elles grandissent et
qu'elles deviennent des adultes, aussi parce que c'est ce qu'ont fait
les actrices.
Il était également impératif que le film soit autonome et
compréhensible pour ceux qui ne connaissent pas la série, tout en
s'inscrivant dans une progression logique et en gardant les
personnages reconnaissables. Elles étaient d'innocentes adolescentes
de quinze ans dans la série, mais dans le film, elles perdent leur
innocence. Le plus important, c'est qu’elles ont besoin l’une de
l’autre pour rester fidèles à elles-mêmes.
Votre précédent film, Night Run, était un drame sombre
doté d’un cadre réaliste (la guerre des taxis à Amsterdam) et d’un
scénario original, tandis que Dunya & Desie est basé sur une
série télévisée et possède un ton globalement plus léger. Dans quelle
mesure le ton différent des deux films est-il lié aux éléments de
base de leurs scénarios ?
Je vois Night Run et Dunya & Desie tous les deux comme
des scénarios originaux (pas des dérivés) qui dictent un style de
réalisation différent. Robert et moi avons créé ces personnages et
ensemble les avons guidés au fil de leur croissance. Dunya &
Desie, la série et le film, sont des histoires importantes qui
ont besoin d’être racontées. Dans une société de plus en plus rude où
on nous fait constamment remarquer nos différences, Robert et moi
avons toujours essayé de chercher, au contraire, ce qui nous
rapproche. J’ai développé le style que je pensais pertinent pour
Dunya et Desie – de la même manière que pour chaque scénario,
j’essaie toujours de développer un style approprié. Pour moi,
Dunya & Desie est tout aussi réaliste que Night Ride.
Il y a des millions de Dunya et de Desie dans ce monde.
Dans quelle mesure Dunya & Desie participe-t-il du
phénomène pluriethnique dont participent également Schnitzel Paradise [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Martin Khoolhoven
interview : Mimoun Oaïssa
fiche film] et Shouf Shouf Habibi! ? Dans quelle mesure
le film se destine-t-il au marché hollandais uniquement ?
En effet, Dunya & Desie fait partie de cette tendance, mais je
veux souligner que c’est le premier film de ce genre aux Pays-Bas. C’est une tendance qui est en train de s’accentuer en Europe, tout simplement parce qu’une nouvelle génération de réalisateurs a grandi dans une société pluriethnique. La série s’est vendue dans de
nombreux pays, donc nous savions qu'elle était aussi appréciée à
l’étranger. La sélection du film pour le Festival de Berlin, c'est un
rêve devenu réalité. Là-bas, les réactions des spectateurs ont dépassé toutes nos attentes, ce qui m'amène à penser que l’amitié qui unit Dunya et Desie est quelque chose d’universel.
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