05/07/2017 - KARLOVY VARY 2017 : La réalisatrice géorgienne Mariam Khatchvani explore les vieilles coutumes qui continuent d’exister dans sa région natale

Son court-métrage Dinola, nominé aux EFA en 2013, représentait pour la jeune réalisatrice géorgienne Mariam Khatchvani un test pour un premier long. Le film s’intéressait aux traditions spécifiques à la région de la Svanétie, sa region natale. À présent, son long-métrage Dede [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film], projeté en avant-première mondiale dans la section East of the West de Karlovy Vary, poursuit l’enquête.

Le film commence en 1992, quand David (Nukri Khatchvani) et Gegi (George Babluani) reviennent dans le village natal du premier après avoir fait la guerre. Comme Gegi a sauvé la vie de David, celui-ci insiste pour qu’il soit son invité et assiste à son mariage avec Dina (Natia Vibliani). Ce qu’il ne sait pas, c’est que Dina et Gegi se connaissent déjà, et qu’ils ont même été amoureux. Tant et si bien que la jeune fille annonce à sa famille qu’elle ne consent plus au mariage arrangé, ce que son grand-père refuse catégoriquement d’entendre, car se défausser couvrirait leur nom de honte.

Bien sûr, cela met Gegi et David dans une position compliquée. Quand David propose à son ami/rival (avec colère) d’aller chasser avec lui et Girseli (Girshel Tchelidze), un voisin et ami d’enfance de Dina, l’aventure se solde par une mort inattendue, hors-écran : David s’est donné la mort. Après cela, Gegi emmène Dina dans son village, et l’histoire s’interrompt pour reprendre cinq ans après, alors qu’ils ont désormais un fils.

Quand Gegi meurt à son tour, c’est Girseli qui demande la main de Dina, car il est amoureux d’elle depuis toujours. Bien que le prêtre du village lui assure qu’il serait bon d’abandonner certaines traditions et coutumes, il s’obstine, et kidnappe Dina, mais le père de Gegi n’a pas l’intention de laisser son petit fils quitter le cercle familial.

Le récit suit plusieurs fils, quoique son thème principal soit avant tout les coutumes anciennes, souvent cruelles, mais Khatchvani les manie comme des exemples révélateurs plutôt que comme les éléments solidaires d’une intrigue. Le film est aussi une ode à la superbe région de la Svanétie, avec ses superbes montagnes et ses traditions, sa musique folklorique et ses contines, ses superstitions, son artisanat et sa pratique de la chasse. La plupart des moments les plus dramatiques sont laissés hors-champ, du fait du petit budget du film et des conditions difficiles de sa production – car en plus de tourner en terrain difficile, sans aucune infrastructure, une partie des acteurs ont été arrêtés par la police locale, complètement corrompue, et incarcérés pendant six mois. Il faut dire que tous les acteurs du film sauf Babluani sont des non professionnels, et bien qu’on comprenne le choix de Khatchvani, désireuse de tourner son film dans le dialecte local, le svane, que ne parlent que 10 000 personnes, elle aurait aussi pu choisir, pour un film avec un tel contenu dramatique, de vrais acteurs.

La rudesse et la beauté du décor et la crudité de l’esthétique et de la mise en scène du film devraient assurer à Dede (un mot qui signifie “maman” en svane) un beau parcours dans les festivals. Elles font aussi du film une étude anthropologique attrayante et intriguante. Le maintien de ces coutumes obsolètes sur l’honneur familial et la soumission de la femme (y compris s’agissant du sort de son enfants) est tout à fait choquant, mais l’angle choisi par Khatchvani permet de voir le meilleur comme le pire de sa région natale.

Dede a été coproduit par la société géorgienne 20 Steps Production, avec les branches britannique et irlandaise de Film & Music Entertainment, la société hollandaise JaJa Film Productions et la croate MP Film. Les ventes internationales du film sont gérées par Wide Management.

(Traduit de l'anglais)