05/09/2017 - VENISE 2017: Le deuxième long-métrage de Sebastiano Riso, en lice pour le Lion d’or, aborde le terrible sujet du marché noir des nouveaux nés

C’est sur le terrain difficile de la location d’utérus, ou pour le dire plus simplement du marché noir des nouveaux nés, que s’aventure Una famiglia [+lire aussi :
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interview : Matilda De Angelis
interview : Sebastiano Riso
fiche film], le deuxième long-métrage de Sebastiano Riso, en compétition à la Mostra de Venise. Le film, produit par Indiana avec Rai Cinema et la participation de la société française BAC Films (qui en assure aussi les ventes), et en collaboration avec Manny Films, sortira en Italie le 28 septembre avec BIM.

Pour aborder son délicat sujet, avec les scénaristes Stefano Grasso et Andrea Cedrola, Riso a décidé d’enquêter en profondeur sur les dynamiques du phénomène, c’est-à-dire d’écouter des dizaines de conversations téléphoniques interceptées dans le cadre d’affaires de ce genre, et de lire des milliers de documents fournis par le Procureur de Grosseto. Adopter est très difficile pour les couples hétérosexuels, interdit pour les couples homosexuels, de sorte que certains deviennent la demande sur le marché noir des bébés, qui grossit à la faveur du vide législatif. Dans Una famiglia, Riso ne choisit cependant pas le ton du thriller législatif, ni d’enquêter sur la maternité ou la paternité à tout prix vus comme expressions du plus grand des égoïsmes : il se concentre sur un couple de “donateurs” clandestins et sur leur rapport “malade”.

Nous sommes à Rome avec Maria (Micaela Ramazzotti, déjà dans le premier film de Riso, Mezzanotte [+lire aussi :
critique
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fiche film], sélectionné à la Semaine de la Critique de Cannes en 2014), une jeune femme de la banlieue hantée par les enfants qu’elle a donnés, qu’elle voit partout, même dans le métro. Des années plus tôt, elle a rencontré Vincenzo (Patrick Bruel), un Parisien fascinant, froid, au comportement parfaitement contrôlé, et elle est tombée amoureuse. Le début du film les cueille au moment où elle commence à se rebeller et à rêver d’une vraie famille. Alors qu’il l’oblige à manger les feuilles d’une plante péruvienne censée augmenter sa fertilité, elle va en secret chez le médecin pour qu’il lui pose un stérilet et qu’elle voie enfin la fin de ce business qui rapporte à Vincenzo 50 000 euros minimum par enfant. On note au passage que leurs rapports sexuels, pour être fonctionnels, puisqu’il s’agit de produire les bébés qu’ils mettront en vente, n’en sont pas moins intenses et passionnés. Mais qu’est-ce qui pousse Maria à aimer à ce point un monstre qui l’utilise comme usine à nourrissons ? On ne peut que deviner quelles blessures passées ont pu amener la jeune femme à s’abandonner à cet amour masochiste, à cette recherche inconsciente de souffrance et d’humiliation. Quant à Vincenzo, il fait certainement ce qu’il fait pour l’argent, mais quand un “acquéreur” lui dit qu’il perçoit dans ses yeux quel peut avoir été son passé, il répond aussi : “Vous ne pourriez même pas l’imaginer”. Ainsi, deux pathologies mentales se sont unies autour d’une entreprise scélérate par laquelle la femme est contrainte à la procréation en continu, et à des mois de grossesse jusqu’à l’accouchement qui va la priver d’un énième bébé, faisant de son parcours une maternité toujours manquée et un deuil incessant.

À travers une mise en scène sophistiquée qui use de longs plans-séquences, de dollies, d’objectifs macro et d’une caméra toujours en mouvement qui ne lésine pas sur les très gros plans de notre héroïne désespérée, Sebastiano Riso fait se déployer l’intrigue sans hésiter à appuyer sur la pédale de l’excès dramatique, dans le but de faire la lumière sur une des facettes cachées de notre société. La troupe du film comprend aussi Pippo Delbono, Fortunato Cerlino, Marco Leonardi, Matilda De Angelis et Ennio Fantastichini.

(Traduit de l'italien)