27/03/2024 - Oliver Parker signe un film grand public sur la mémoire de la guerre avec un scénario bien structuré à différents niveaux de lecture, et pour interprètes Michael Caine et Glenda Jackson

Un vieil homme au passé incertain plante son bâton dans le sable mouillé et avance vers la mer. Il semble seul, mais d’autres hommes apparaissent ensuite autour de lui, avec le même regard fixé vers l’horizon, les mêmes décorations militaires accrochées à leur veste et les mêmes images dans la tête. Nous sommes en 2014, c’est le soixante-dixième anniversaire du débarquement en Normandie, et l'homme au bâton compte parmi les nombreux anciens combattants présents, qui ont survécu à ce 6 juin 1944 et sont encore là pour le raconter. Il s'appelle Bernie Jordan et il est devenu une star des journaux télévisés pour avoir réussi une impressionnante entreprise : celle de partir d’Angleterre, seul, à 90 ans, armé uniquement de son déambulateur, pour rejoindre la plage du débarquement et rendre hommage à ses compagnons tombés au combat, une "grande évasion" qui a fait le tour du monde et qui a projeté Bernie à la une des quotidiens.

The Great Escaper d'Oliver Parker, inspiré d’une histoire vraie, retrace le voyage à la rencontre de ses fantômes de ce vieux soldat de la Seconde Guerre mondiale en proie à un grand sentiment de culpabilité lié à son rôle dans le conflit. Il raconte dans le même temps son extraordinaire histoire d’amour avec Renée, sa femme, commencée précisément soixante-dix ans plus tôt, sous les bombes, l'amour étant un des sentiments profonds qui, après le traumatisme de la guerre, sont les seuls à vous maintenir véritablement en vie. Et c’est précisément la complicité de son épouse, âgée mais tenace, qui attend patiemment le retour de Bernie dans la maison de retraite où ils vivent tous les deux, qui s'avère déterminante pour la réussite de sa nouvelle "mission" en Normandie.

The Great Escaper, présenté au Bif&st de Bari en première internationale, est un film grand public qui repose sur un scénario (de William Ivory) bien structuré et jamais rhétorique, mais surtout sur un duo d’interprètes exceptionnels, deux géants du cinéma, Michael Caine et Glenda Jackson (dans les rôles de Bernie et Renée), qui ravissent, étonnent et émeuvent. La dernière fois qu’ils avaient travaillé ensemble avant ce film, c’était presque cinquante ans plus tôt. Ce rôle restera la dernière apparition sur le grand écran de Jackson (décédée en juin dernier) et c'est probablement aussi la dernière de Caine, qui à 91 ans a annoncé après ce film qu'il prenait définitivement sa retraite. Parker les filme avec empathie, et saisit dans de splendides gros plans toutes les expressions et les plis de leurs visages.

On voit aussi les personnages jeunes (incarnés par Will Fletcher et Laura Marcus), à travers quelques flashbacks, quand ils étaient beaux, passionnés et terrorisés par les bombardements. Ces flashbacks permettent de recomposer petit à petit le puzzle du traumatisme vécu par Bernie pendant le débarquement, éclaircissant du même coup les raisons de son obstination à faire ce voyage soixante-dix ans après. "Certains peuvent survivre à la guerre, mais personne ne survit indemne", dit-il. En abordant les troubles du stress post-traumatique de manière profondément humaine, dans ses différentes nuances, Parker et Ivory reconstruisent un fait divers qui a fait sensation et un thème qui pourrait sembler grossi, transformant l’ensemble en une oeuvre très touchante et précise, équilibrée et pleine de chaleur humaine.

The Great Escaper a été produit au Royaume-Uni par Ecosse Films et BBC Film, en coproduction avec la société suédoise Film i Väst. Les ventes internationales du film sont gérées par Pathé. En Italie, il sera distribué à partir du mois de juin par Lucky Red.

(Traduit de l'italien)