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Sanna Lenken • Réalisatrice

“L’anorexie est comme une drogue, mais peu de films en parlent."

par 

- La Suédoise Sanna Lenken a présenté son premier film, My Skinny Sister, au 16ème Festival du cinéma européen de Lecce, où il a remporté le prix du scénario, le FIPRESCI et le Prix du public

Sanna Lenken  • Réalisatrice

My Skinny Sister [+lire aussi :
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interview : Sanna Lenken
fiche film
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, un drame sur l'anorexie vue à travers le regard d'une fillette qui a déjà été primé à Göteborg et Berlin (lire la critique), a remporté au 16ème Festival du cinéma européen de Lecce (13-18 avril) le prix du scénario, le FIPRESCI et le Prix du public. Ce premier long-métrage est donc une réussite pour la Suédoise Sanna Lenken, déjà réalisatrice d'une série télévisée pour enfants (Dubbelliv - Double Life) et de plusieurs courts-métrages qui ont fait de beaux parcours dans les festivals du monde. L'un d'eux, Eating Lunch, parlait déjà des troubles alimentaires chez les jeunes, mais l'angle était différent. 

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Cineuropa : Du court au long, comme votre tableau de l'anorexie a-t-il évolué ?
Sanna Lenken : J'ai commencé à écrire le film il y a six ans, avant de faire le court Eating Lunch. Au cours de mes recherches, j'ai trouvé beaucoup d'histoires intéressantes. Une fille en particulier m'avait rapporté des histoires vécues dans une clinique dédiée au traitement des troubles alimentaires, dont une était parfaite comme sujet pour un court. Je me suis dit qu'il ne fallait pas que je perde de temps (surtout que j'étais tombée enceinte entretemps) et comme j'avais envie de raconter cette histoire, j'ai fait le court-métrage avant. Cette décision s'est avérée bonne parce que le court-métrage m'a servi pour financer le long : il est passé dans une quarantaine de festivals internationaux et il a gagné plusieurs prix, en plus d'être montré dans certaines écoles. Le court et le long-métrage montrent deux aspects différents de la maladie, mais étroitement liés. 

Donc les personnages du long-métrage ne sont pas les mêmes que dans le court ?
Non. Dans Eating Lunch, les personnages sont les pensionnaires d'une clinique traitant les troubles de l'alimentation, à l'heure du déjeuner. Comme elles ont trente minutes pour manger mais aucune envie de le faire, elles se regardent et se provoquent entre elles. Dans le film, la perspective est différente : on adopte le point de vue de la petite soeur d'une malade.

Pourquoi avez-vous choisi le thème de l'anorexie pour faire vos débuts dans le long ?
J'ai moi-même souffert de cette maladie quand j'étais ado. J'avais besoin de raconter une histoire liée à ce problème parce que je n'en ai pas vu beaucoup au cinéma. Je voulais aussi parler de ce que c'est d'être une petite fille et de faire face à quelque chose d'aussi lourd, et des tourments que cause l'idée qu'il faut paraître, être comme ceci ou comme cela. Le film touche plusieurs sujets, pas seulement l'anorexie. Le monde entier est confronté au phénomène ; il n'y a pas qu'en Suède qu'il prend de l'ampleur. J'ai rencontré tellement de jeunes filles malades qui sont tellement talentueuses et belles : je devais faire ce film. L'anorexie est une dépendance, comme les drogues et l'alcool : le mécanisme est le même. Dans le film, on suit une famille, en particulier deux soeurs, se retrouve face à cette maladie. Cette jeune fille en est une claire victime, mais nous le sommes tous. 

Stella est la première à prendre conscience de la maladie de Katja. Comment est venue l'idée de raconter l'histoire du point de vue de la petite soeur ?
J'ai moi aussi une petite soeur. Au début, quand j'ai commencé d'écrire l'histoire, j'ai adopté le point de vue de la malade, et puis j'ai repensé à ma soeur, à sa terreur, à la peur qu'elle a eue de me perdre. En vérité, plus que le fait que je ne mange pas, c'est l'idée que je sois malade dans ma tête qui la préoccupait, parce que quand on souffre de troubles alimentaires, on le devient un peu, c'est vrai : on est manipulatrice, on a des accès hystériques... La perspective de Stella rend l'histoire plus universelle. 

Les deux jeunes actrices principales sont parfaitement en accord. Comment les avez-vous trouvées ?
Je les ai cherchées pendant un an. J'ai vu des centaines de filles. Ce n'était pas facile parce qu'elles devaient se battre, pleurer, s'aimer, et m'avoir toujours très près d'elles. J'ai d'abord trouvé Katja, enfin Amy Deasismont, qui est chanteuse pour enfants (sous le nom d'Amy Diamond, ndlr.). C'est le directeur de casting, Catrin Wideryd, qui a pensé à elle. J'étais sceptique, je pensais qu'elle ne conviendrait pas, parce qu'elle est connue pour être toujours joyeuse et souriante. Et puis quand je l'ai auditionnée, j'ai été très surprise : elle a montré une nouvelle facette d'elle, car elle se sentait proche des émotions du film. Pour Stella, j'étais préoccupée. J'en suis même arrivée à un point où je me suis dit que si je ne la trouvais pas dans les deux semaines, le film était fichu. C'est au moment où mon désespoir atteignait son comble que le directeur de casting a trouvé Rebecka Josephson. Je l'ai trouvée extraordinaire, et elle s'améliorait d'essai en essai. J'ai ensuite réuni les deux filles, pour voir comment elles interagissaient entre elles, avec leurs chevelures rousses similaires... et là j'ai vu l'amour.

Diriger une enfant dans un rôle aussi dramatique ne doit pas être facile. Comment avez-vous travaillé avec Rebecka/Stella en particulier ?
Sa mère craignait que Rebecka ne se fatigue, alors nous avons décidé qu'elle ne travaillerait pas plus de sept heures par jour. Le matin, je répétais avec les adultes et puis elle arrivait et on tournait, et même si elle ne connaissait pas toujours ses répliques, ça fonctionnait parce qu'elle était naturelle. Elle avait confiance en elle parce qu'avant de tourner, nous faisions beaucoup d'improvisations avec toute la famille. Dans les scènes où elle pleure, elle est rentrée toute seule dans l'émotion qu'il fallait. Parfois, je lui demandais si tout allait bien, et elle me disait : "Vois-tu, Sanna, ça ne fait pas de mal de pleurer une fois de temps en temps". Comme une adulte ! Et puis elle s'est beaucoup attachée à Amy, et inversement. Quand elles sont ensemble, elle joue très bien, il y a une belle entente entre elles. Dans les scènes où il y avait d'autres enfants, je devais la stimuler un peu plus.

Quand pourra-t-on voir My Skinny Sister dans les salles ?
Le film sortira en Suède en septembre. Il a été vendu en France, en Allemagne, dans presque toute la Scandinavie – dans une dizaine de pays européens en tout. Il sortira aussi en Asie, en Corée du Sud, en Iran, en Irak et dans d'autres pays du Moyen-Orient. Je voudrais que les parents voient ce film avec leurs enfants et réfléchissent au poids que les adolescents sentent parfois sur leurs épaules.

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(Traduit de l'italien)

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