email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

Fabio Mollo • Réalisateur

"Cesser d’être des enfants et devenir parents"

par 

- Le réalisateur calabrais Fabio Mollo présente Il padre d’Italia, un road movie où il est question de l'avenir, du fait d'être parent et de l'amour, dans les salles en Italie à partir du 9 mars

Fabio Mollo  • Réalisateur

Avec son premier long-métrage, Il Sud è niente [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film
]
(2013), Fabio Mollo avait été invité à Toronto, Rome (où il a gagné le Prix Taodue) et Berlin, et nominé aux Globi d’oro. Son deuxième, Il padre d’Italia [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Fabio Mollo
fiche film
]
, arrive ce 9 mars sur les écrans transalpins. Pour les rôles principaux, celui d’une femme enceinte qui ne veut pas d’enfants et celui d’un homosexuel qui rêve de devenir père, le jeune réalisateur calabrais (36 ans) est parvenu à embaucher Isabella Ragonese et Luca Marinelli. Ensemble, ces deux personnages vont se lancer dans une folle équipée du nord au sud de l’Italie.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Cineuropa : Dans Il padre d’Italia comme dans votre premier film, le Sud a un rôle très important. Y a-t-il un fil rouge qui relie Il Sud è niente et ce deuxième long-métrage ?
Fabio Mollo : À vrai dire, les deux films représentent des mondes très différents. Il Sud è niente était un film atmosphérique, volé au réel, avec une interprète (Miriam Karlkvist) qui n’avait jamais fait l’actrice avant. Il padre d’Italia repose au contraire sur les dialogues et la mise en scène des personnages. Dès le départ, je l’ai conçu comme un film où la trame prime sur l’atmosphère, nécessitant deux acteurs aguerris. Au-delà de ça, les deux films sont nés du même sentiment d’urgence lié à la volonté de contribuer au récit d’une génération, de notre société et du moment culturel que nous sommes en train de vivre Dans Il Sud è niente, j’abordais le thème de l’omerta sociale et le fait qu’elle qui devient une omerta privée ; ici, je parle de deux trentenaires qui ont peur de devenir parents, pour des raisons différentes.

Vos deux films ont aussi en commun une certaine corporéité...
J’aime bien le cinéma physique. Dans Il padre d’Italia, le corps est très important. Isabella et Luca sont souvent nus, mais même habillés, ce que racontent leurs corps est fondamental – comme ce que racontait celui de Grazia dans Il Sud è niente. J’aime bien les films de chair et d’os et de sang. Bien que Il padre d’Italia soit riche en dialogues, je voulais garder cet aspect charnel.

Qu’avez-vous voulu dire, sur le fait d’être parents ?
Pour moi, il était important de parler d’une génération et du moment où l’on cesse d’être des enfants pour s’essayer au rôle de parents, nonobstant les difficultés que cela emporte et la précarité – financière et émotionnelle. Chacun à sa manière, Paolo et Mia sont dans des situations précaires. Paolo vit en retrait du monde et Mia, à l’inverse, déborde de vitalité. Le voyage dans lequel elle l’entraîne va l’obliger à envisager la paternité, un sujet qu’il a toujours complètement occulté, parce qu’il lui semblait nul et non avenu pour un homme gay comme lui.

Pourquoi avez-vous donné à Il padre d’Italia la forme d’un road movie ?
L’aspect road movie était important parce que pour moi, les histoires d’amour sont comme des voyages, or ce qui naît entre ces deux personnages qui se rapprochent l’un de l’autre à un moment très délicat de leur vie, c’est de l’amour – un amour qui n’est pas lié au sexe, qui fait fi des barrières établies. Le parcours que fait le film à travers l’Italie est géographique, mais aussi émotionnel et social. Plus le sud est proche, plus les personnages se dénudent, non seulement parce qu’il fait chaud, mais parce que ce faisant, c’est comme s’il se débarrassaient de leurs armures et se laissaient aller à vivre, tout simplement, surtout Paolo. 

Une des scènes les plus évocatrices est celle de l’orphelinat. Comment l’avez-vous construite ?
Dès le départ, l’idée était que ce voyage avec Mia soit pour Paolo comme un voyage dans son enfance. On découvre dans le film qu’il a grandi dans orphelinat, donc il m’a semblé important qu’une fois arrivé là, le film prenne un tour quasiment onirique. Quand Paolo entre dans l’orphelinat, c’est comme s’il entrait dans son passé, comme s’il se revoyait, enfant. Nous avons tourné la scène dans un vrai établissement pour enfants, à Turin, et cela a aidé à la structurer. 

Quelles ont été vos références pour ce film ?
J’ai imaginé ce film comme "la rencontre Gianni Amelio et Xavier Dolan", avec une touche de Une Journée particulière d’Ettore Scola. J’aime bien fusionner un peu cinéma italien et cinéma européen. Au niveau de l’écriture, Il padre d’Italia renvoie fortement aux Enfants volés d’Amelio. La mise en scène évoque plus Dolan : la musique est très présente aussi dans le film ; c’est un monde esthétisé bien que pauvre, à l’instar de Mia, qui est une fille des rues mais s’habille toujours comme si elle allait en boîte ; enfin et surtout, parce que comme Dolan, je voulais dès le départ mettre la mise en scène au service des acteurs. Avec Isabella et Luca, nous avons construit Mia et Paolo de scène en scène. Chaque temps fort émotionnel a été discuté ensemble, vécu, changé si besoin.

Comment avez-vous constitué votre bande sonore ?
Mia est chanteuse, et nous voulions qu’elle dévoile elle-même son univers musical. Pour trouver les bonnes chansons, bien adaptées au récit et à la génération ici décrite, il a fallu faire des recherches acharnées. Et le film est enrichi par deux performances de chant : Luca reprenant Loredana Berté à deux moments intimes, Isabella reprenant les Smiths sur scène - quoique pour Paolo, Mia est plus comme Berté : portée à la transgression. La bande sonore rappelle les années 1980, grande décennie de mise en scène quotidienne, notamment visuellement, à travers les couleurs et les vêtements. Il y a aussi dans le film beaucoup de musique électro. 

Après sa sortie en Italie, quelles sont les prochaines étapes pour le film ?
J’espère qu’il sera aussi vu à l’étranger. Les festivals aident beaucoup à ce niveau. Mais dans le cas précis de ce film, je suis content qu’il sorte d’abord en Italie. Contrairement à Il Sud è niente, qui a beaucoup tourné dans les festivals mais n’a pas été largement distribué, je voudrais que ce film soit vu par le plus grand nombre de spectateurs possible, qu’il puisse émouvoir un public plus vaste, parce que vu le genre de thème qu’il aborde et la manière dont il le fait, porté par deux acteurs de ce calibre, il est important qu’il soit partagé et discuté, avec un peu de chance qu’il incite au débat. 

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'italien)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy