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RENCONTRES L’ARP 2022

"Le travail du CNC n’est pas la recherche de la rentabilité"

par 

- Dominique Boutonnat, le président du CNC a clarifié ses intentions lors d’un débat très animé sur la diversité de la création organisé aux 32es Rencontres Cinématographiques de l'ARP

"Le travail du CNC n’est pas la recherche de la rentabilité"
(g-d) Edouard Mauriat, Marc Missonnier, Lucie Girre (prochaine déléguée générale de l'ARP), l'acteur Lyes Salem, Carole Scotta et Dominique Boutonnat lors du débat (© Susy Lagrange)

Mis sur orbite par le réalisateur Thomas Lilti, co-président de la 32e édition des Rencontres Cinématographiques de l'ARP (Société civile des Auteurs-Réalisateurs-Producteurs), qui a rappelé que son premier long n’avait enregistré que 3000 entrées en salles (avant qu’il ne s’affirme comme une valeur très sûre du box-office avec Hippocrate [+lire aussi :
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à 950 000 entrées, Médecin de campagne [+lire aussi :
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à 1,5 million et Première année [+lire aussi :
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à 1 million) et qu’il était primordial que le système français "préserve ce droit à l’erreur", le débat "Diversité de la création : atout culturel, politique et économique ?" a tenu toutes ses promesses avec, parmi les intervenants, un président du CNC, Dominique Boutonnat mis très fortement à contribution (et se prêtant volontiers à toutes les questions, y compris les plus courtoisement acérées) comme rarement vu dans ce genre d’enceinte.

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"Le travail du CNC n’est pas la recherche de la rentabilité" a insisté Dominique Boutonnat, interpellé par le réalisateur Radu Mihaileanu qui se faisait l’écho notamment des récents débats de l’Appel à des États généraux du cinéma (lire l’article). Le président du CNC a aussi qualifié de fausse rumeur le fait que l’accès à l’avance sur recettes impliquerait l’obligation d’avoir déjà l’ensemble du plan de financement du projet : "il n’y a pas de critères de rentabilité dans le choix des films, pas de consignes. Cela n’empêche que ce n’est pas si mal d’avoir des films rentables, mais le financement public est là pour aller où le financement privé ne va pas".

Sur le programme national d’investissement (en infrastructures et formation) "France 2030" et face aux inquiétudes de certains professionnels sur la création notamment de nouveaux studios de tournage qui les transformeraient en simples producteurs exécutifs (des streamers) et où les prises de vue de cinéma seraient réduites à la portion congrue en faveur des productions audiovisuelles, Dominique Boutonnat a indiqué que des obligations d’intérêt général et de service public (éventuellement des quotas ou des politique tarifaires spécifiques pour que ces studios soient accessibles à tous) accompagneraient les résultats des appels d’offre. Il a souligné également que ces investissements étaient nécessaires pour éviter une dépossession nationale à l’image de Netflix construisant ses propres studios en Espagne ou de Disney réservant les studios londoniens de Pinewood pour neuf années.

Sur la question des visa temporaires de projection en salles (500 séances maximum sur deux jours sur toute la France), le président du CNC a assuré que "s’il y avait des détournements, si ce système était utilisé par les plateformes pour faire de la publicité pour leurs sorties plateformes", le CNC le ferait évoluer, "car il n’est pas fait pour leur donner une vitrine marketing."

Dominique Boutonnat a également assuré que les engagements de programmation (garantissant l’accès des films aux salles) suspendus ces dernières années allaient être réactivés, mais qu’en l’état juridique actuel, le CNC n’avait aucun moyen de s’opposer à la multidiffusion que l’on peut prédire par exemple pour Black Panther : Wakanda Forever et Avatar 2. Carole Scotta (Haut et Court), co-présidente des distributeurs du DIRE a déploré l’absence de cet outil de régulation qui existait auparavant ("la diversité de la création passe aussi par la diversité de la diffusion") et souligné que l’adoption de moyens juridiques permettant de sanctionner les dérives était pourtant une option sur la table depuis des années...

Sur le volet de la chronologie des médias adoptée en janvier dernier pour trois ans (lire la news), le président du CNC a évoqué la nécessité d’utiliser la clause annuelle de revoyure pour de petits ajustements, notamment sur les questions d’étanchéité des fenêtres (celles des chaînes en clair) pour des films exclusivement financés par des opérateurs extra-européens (autrement dit, les frictions de Disney avec les chaînes françaises en clair). Une demande fraichement accueillie par Édouard Mauriat (Mille et Une Productions, vice-président long métrage du Syndicat des Producteurs Indépendants) et Marc Missonnier (Moana Films, vice-président de l'Union des Producteurs de Cinéma). Selon ce dernier, "quand on parle de faire évoluer la chronologie, cela signifie en réalité faire avancer les plateformes (aujourd’hui à 17 mois après la sortie salle, sauf 15 mois pour Netflix, les chaînes en clair étant à 22 mois). Mais elles peuvent déjà avancer à 12 mois ou 6 mois si elles signent un accord avec les organisations du cinéma français avec des garanties de volume et de diversité". "Une réouverture des discussions n’est pas une réouverture des négociations" a rétorqué Dominique Boutonnat qui a aussi mis en avant la nécessité qu’il n’y ait pas de trous dans l’exploitation suivie des œuvres.

Place du hors films dans les salles, formation, renouvellement des publics, etc., rarement le président du CNC n’avait été autant sollicité par des questions aussi diverses, souvent insistantes, voire incisives, des professionnels, et tout aussi rarement il y avait répondu avec autant de volonté persuasive (et aussi d’habileté à équilibrer engagement et esquive). Un épisode inédit qui est une preuve supplémentaire du nouveau climat régnant dans l’industrie cinématographique française. Qu’en sortira-t-il concrètement ? Affaire à suivre…

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