email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

Valeria Sarmiento • Réalisatrice

"Je n'ai pas eu l'ambition de réaliser le film à la manière de Raul"

par 

- La réalisatrice chilienne a repris le projet Les Lignes de Wellington, après le décès de son époux, Raoul Ruiz

Cineuropa a rencontré la réalisatrice Valeria Sarmiento lors de son passage à la Mostra de Venise pour y présenter Les Lignes de Wellington [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Valeria Sarmiento
fiche film
]
, un projet sur lequel travaillait son époux, Raul Ruiz, au moment de son décès en août 2011.

Cineuropa : A quel stade se trouvait le projet lorsque vous l'avez récupéré sur la table de travail de Raoul Ruiz ?
Valeria Sarmiento : Raoul avait reçu le scénario de Carlos Saboga et il avait noté à la main trois petits changements qu'il lui avait adressés. Il avait également fait des recommandations au sujet des thèmes qu'il voulait faire travailler aux musiciens. Entretemps, nous sommes allés à Lisbonne faire quelques repérages et il en a profité pour choisir une partie des comédiens. Il est tombé malade juste après et il n'a rien pu faire de plus.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous êtes-vous imposé un respect de son style pour la réalisation en vous interdisant des choses que lui même n'aurait pas faites ?
Nous avons vécu 40 ans ensemble et j'ai monté deux tiers de ses films. Je suis donc très familière avec son style, mais je n'ai pas eu l'ambition de réaliser le film à la manière de Raoul. J'ai pris en compte son travail préparatoire, les changements qu'il avait demandés et la musique qu'il avait choisie, mais à part cela, j'ai fait le film à ma façon.

Et vous avez maintenu les comédiens déjà choisis ?
Il y avait effectivement quelques comédiens déjà sélectionnés par Raoul. Je les ai gardés, mais pas forcément dans les mêmes rôles. Nous avons fait un nouveau casting auquel nous avons ajouté les acteurs qui étaient loyaux à Raoul et qui désiraient lui rendre hommage en apparaissant dans le film. Nous avons tous beaucoup pensé à lui au moment du tournage.

En tant que Chilienne, en quoi cette histoire d'invasion du Portugal vous a-t-elle parlé intimement ?
Pour moi, cet épisode historique est évidemment très éloigné. J'ai donc essayé de lier ensemble des choses qui étaient plus susceptibles d'impliquer mes émotions comme le rôle des femmes dans le film ou ma propre expérience et celle de mes proches sous la dictature de Pinochet au Chili. Mais, outre le lien intime, j'ai voulu que ce film soit une réflexion plus générale et politique. Il est important de se souvenir que l'Europe a été construite sur des millions de cadavres et en ces temps de crise que nous traversons, faire un film comme ça, c'est faire un film politique.

Dans cette histoire de résistance, le peintre interprété par Vincent Perez est un artiste qui n'est pas libre de faire son travail comme il veut. Peut-on y voir un lien avec la situation de l'industrie cinématographique actuelle au Portugal ?
Il n’est pas facile de faire des films au Portugal pour l’instant et nous avons connu la même situation en Amérique latine. Ce peintre représente un artiste avec sa vision personnelle face à un système qui le restreint. L’histoire de ce peintre suisse, Henri Lévêque, est véridique. Il était chargé de peindre des paysages avant l’arrivée des troupes pour rendre compte du territoire. Il faisait du repérage. La "production designer", Isabel Branco, s’est beaucoup inspirée de ces tableaux pour le côté plastique du film et ses costumes. Elle a reproduit la palette chromatique qu’utilisait ce peintre.

Le film est financé à 75% par la France et pourtant les troupes françaises ne sont pas flattées par l'intrigue. Cela a-t-il posé problème ?
Non, au contraire. Cet épisode est complètement oublié par les Français qui se souviennent plutôt des défaites en Espagne ou en Russie. Le retrait au Portugal est laissé pour compte dans les livres d’Histoire et les Français qui ont vu le film ont trouvé cela plutôt instructif. Il n’ont pas réagi négativement à la cruauté et à la brutalité de l’armée française telles qu'elles sont montrées dans le film.

La version télévisée sera plus longue. Qu’avez-vous retiré dans ce montage cinématographique pour le raccourcir ?
A la télévision, il s’agira de trois épisodes de 55 minutes. Ils seront d’abord diffusés au festival de San Sebastian, en avant-première. La construction du film est semblable à celle des Contes des 1001 Nuits. J’ai simplement retiré deux histoires pour raccourcir l’ensemble. C’est relativement facile à faire avec un film comme cela.

Quelle est la leçon la plus importante que vous a enseignée votre époux et qui vous a été la plus utile sur ce film ?
Raul me disait souvent qu’il faut toujours tourner sans laisser beaucoup de possibilités de montage. Ca m’a beaucoup aidé sur ce film et, étant monteuse moi-même, je n’ai tourné que le nécessaire. Une semaine après la fin du tournage, nous avions la première version du film qui n’a pas beaucoup changé. C’est comme cela que travaillait Raoul. C’était une espèce de génie qui a fait 50 films et qui a toujours eu le montage dans sa tête en quittant le plateau.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy