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Gilles Ciment • Théoricien du cinéma

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- Dans le cadre du Forum d’Avignon 2013, Cineuropa a rencontré Gilles Ciment, théoricien du cinéma et de la bande dessinée français

Gilles Ciment • Théoricien du cinéma

Cette année, Cineuropa s’est associé au Forum d’Avignon, dont la 6ème édition s’est concentrée sur « les pouvoirs de la culture ». Dans le cadre du Forum, Cineuropa a rencontré Gilles Ciment, théoricien du cinéma (d’animation en particulier) et de la bande dessinée français. Il est directeur général de la Cité internationale de la bande dessinée et de l'image à Angoulême depuis 2007.

Cineuropa : Pouvez-vous nous faire un état de lieux de l’animation ?
Gilles Ciment : La France a connu une vraie révolution dans la réalisation de long-métrages d’animation depuis Kirikou. Elle produit aujourd’hui un bon nombre de films d’animation de qualité qui ont du succès, comme Zarafa ou Aya de Yopugoun. Le secteur du cinéma d’animation n’a pas vraiment été touché par la crise. En revanche, la situation est plus dure pour l’animation télévisuelle, car les chaînes peuvent moins acheter, leurs budgets étant plus réduits à cause de la baisse des financements des chaînes publiques. On est donc dans un moment un peu difficile, mais cela ne concerne pas que ce secteur. Le problème est que les producteurs de cinéma d’animation comptent souvent sur les séries d’animation pour que les équipes continuent de travailler pendant la longue gestation d’un long métrage d’animation. La baisse des commandes est un problème, pour ne pas dire une vraie tragédie.

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On voit pas mal d’adaptations de bandes dessinées au cinéma en ce moment.
Ce genre d'adaptations a toujours existé, mais on peut parler aujourd’hui d’une légitimité accrue pour des œuvres comme Le bleu est une couleur chaude ou Quai d’Orsay. Grâce à sa grande vitalité, qui se traduit par une grande diversité, la bande dessinée offre aujourd’hui des sujets qui peuvent intéresser des réalisateurs comme Abdellatif Kechiche ou Bertrand Tavernier. C’est un phénomène qui reflète peut-être une crise de la création – en ce moment, on voit au cinéma plus d'adaptations et de suites que d’œuvres premières –, mais je pense que c’est surtout un manque de confiance de la part des investisseurs, qui préfèrent se lancer dans quelque chose qui a déjà bien marché (une BD, la suite d’un film) que dans quelque chose de complètement nouveau. La bande dessinée profite de cela, mais elle n'est pas la seule : les adaptations viennent aussi des romans, des séries télévisées ou du cinéma lui-même, avec les remakes.

Quelles sont à votre avis les perspectives d'avenir dans le domaine du numérique?
Certains producteurs commencent déjà à investir dans le cinéma enrichi et les nouveaux médias (dans le cadre du cross-média). Il est évident qu’on va voir apparaître des objets numériques nouveaux qui ne sont ni livres, ni films, et sont déjà en train de s’imposer sur les tablettes. Sur Internet, des revues en ligne sur le numérique, comme Professeur Cyclope, ont aussi fait leur apparition. On voit émerger de nouveaux genres de talents qui ne sont plus du même type que les dessinateurs de bande dessinée. Ce ne sont pas seulement des nouveaux types de canaux de diffusion qu'on voit apparaître, ce sont vraiment d’autres genres de production.

Que pensez-vous du Forum d’Avignon et des pouvoirs de la culture ?
Le Forum est un très beau rassemblement de personnalités très différentes. L'événement est peut-être un peu franco-français, mais il a tout de même offert un éclairage sur ce qui se passe au Maghreb ou en Chine, par exemple.
Concernant les pouvoirs de la culture, il faut être prudent.
Je pense que parler de la culture comme un levier économique (comme le fait la "parabole des Tuileries"), c’est tomber dans un piège inextricable. L’investissement culturel n’a pas à chercher des motivations économiques. Le rôle du créateur n’est pas de s’en servir de cette manière, ça revient plutôt à la puissance publique, et encore... Lors de son allocution, Bernard Landry, l’ancien ministre de la Culture du Québec, nous a raconté que quand le Cirque du Soleil a demandé une subvention de 1000 dollars, celle-ci n’a certainement pas été accordée pour avoir un retour sur investissement. Il se trouve que le Cirque du Soleil en particulier fonctionne très bien, mais ce n’est pas pour cela qu’on l’a aidé, ni pour cela qu’il faut le faire. Et pourtant, depuis quelques temps, on entend ce discours de la part des collectivités pour tout ce qui est résidences d’artistes (ou dans mon cas pour la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image) : "Quel retour sur l'investissement ?". La mission d'origine de la Cité est le rassemblement, la conservation et la diffusion du patrimoine, ainsi que l'aide à la création. C’est un service public culturel qui agit pour rehausser notre culture. Aujourd’hui, on est en train d’oublier cela, on ne parle qu’en termes d'économie et de cohésion sociale. Il y a d'autres dimensions à prendre en compte pour certains projets, le retour économique et la cohésion sociale ne sont pas le but ultime. Peut-être qu'il aurait fallu parler de ça aussi au Forum. Qui sait, ça sera peut être un sujet pour l’année prochaine ! 

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