email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

Nacho Vigalondo • Réalisateur

"J’aime que mon film soit toujours sur le point d’exploser"

par 

- SAN SEBASTIÁN 2016: Le cinéaste osé Nacho Vigalondo nous parle de sa coproduction canadienne Colossal, un film difficile à classer qui met en scène l’actrice Anne Hathaway

Nacho Vigalondo  • Réalisateur
(© Lorenzo Pascasio)

Présenté hors compétition mais en sélection officielle, un des films les plus attendus de cette 64e édition du Festival de San Sebastián a atterri sur la côte basque, après avoir reçu un accueil chaleureux à Toronto : Colossal [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Nacho Vigalondo
fiche film
]
est le quatrième film de Nacho Vigalondo, un réalisateur autant taquin qu’original. Anne Hathaway, qui y tient le rôle principal, est liée avec un monstre causant des destructions de masse.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Cineuropa: Les remerciements du générique de Colossal mentionnent le nom de certains de vos amis, comme Borja Cobeaga et Carlos Vermut.
Nacho Vigalondo: J’essaye toujours de me souvenir de ceux qui m’ont donné leur avis pendant le développement du projet, et être entouré de tant de talents est une vraie chance – pas pour qu’ils me fassent des compliments mais pour qu’ils me poussent à aller plus loin. Je ne voudrais pas évoluer dans une ambiance où tout se fait en concordance avec ma vision des choses, car un réalisateur n’a pas une perception assez fine de ce qu’il ou elle est en train de faire: c’est presque dans la nature de ce métier de ne pas autoriser l’auteur à prendre la distance nécessaire. C’est rassurant d’avoir ces personnes à proximité, ca me rend plus sûr de moi. Quand un de mes amis n’aime pas quelque chose que je fais, ses félicitations prennent ensuite encore plus de valeur: si quelqu’un critique ton travail puis t’applaudit, tu sais qu’il y a vraiment quelque chose derrière, qu’il ne s’agit pas seulement de flatterie ou de politesse.

On sort de votre film en titubant...
Je voulais que le troisième acte amène le film vers un territoire plus vaste, que les gens puissent l’apprécier au premier degré : je ne voulais pas qu’il faille être intelligent – une idée qui m’attire et me répugne à la fois – pour apprécier la fin.  Même si le film n’est pas soumis au public et ne lui donne pas ce qu’il veut, c’est toujours bien de faire en sorte qu’il fonctionne avec plusieurs types de public : les adolescents, les fans de films d’action, de films de niche, ceux qui aiment les comédies, le cinéma commercial, le cinéma d’auteur. Si je peux réussir à rassembler plusieurs types de publics dans une même salle de cinéma, alors pour moi c’est une réussite incontestable, pas tant pour me mettre dans une position confortable sur un marché mais plutôt pour me faire sortir de ma zone de confort et faire venir d’autres personnes au cinéma.

C’est peut-être votre film le plus accessible, non?
Je vous avoue que je n’ai jamais voulu faire des films inaccessibles… Ou peut-être que je suis en train d’apprendre. Ce n’est pas une victoire pour moi quand mes films deviennent trop tordus pour quelqu’un, c’est plutôt une preuve d’une limite personnelle sur laquelle je dois travailler. J’aime qu’un film soit accessible, et qu’il ait la capacité d’être plus si le spectateur souhaite y voir autre chose de plus profond mais j’aime aussi quand il marche sur le premier plan, même si c’est plus facile à dire qu’à faire. On déprécie parfois les réalisateurs qui sont capables de faire un cinéma commercial, comme si leur travail ne consistait qu’à tourner la manivelle, mais en fait c’est très difficile pour un film de maintenir un rythme qui garde le public en haleine depuis la première jusqu’à la dernière scène.

Colossal se trouve en permanence sur le fil du rasoir, on dirait que vous allez tomber, mais en fait non…
Merci beaucoup ! Même si je suis sûr que beaucoup ont pensé que j’étais vraiment tombé. J’aime que mon film soit toujours sur le point d’exploser. Carlos Vermut m’a fait un très beau commentaire à ce sujet : il y a des parties où on oublie les monstres. Qu’on puisse oublier le conflit global pour parler de choses banales et sans intérêt, puis retourner au conflit global, c’est une idée dangereuse je sais, mais qu’il a beaucoup aimé. Les films de ce genre, depuis le premier King Kong, jusqu’au Pacific Rim de Guillermo del Toro, sont toujours confrontés au même défi : comment lier l’histoire des hommes avec celle des monstres ? Ce sont eux la vraie raison pour laquelle nous allons voir ces films, mais pour que le film puisse s’étirer pendant 100 minutes, il nous faut bien une intrigue humaine, un peu comme le rôle du pain dans un sandwich au jambon. Cette tension entre le pain et le jambon dans un sandwich conduit parfois à avoir un climax avec des monstres, pas des humains. Donc, si les humains n’ont absolument rien à dire pendant le climax (car que pourraient-ils bien dire pendant une immense bataille entre monstres ?), ca me fait m’interroger sur le sens du reste du film. Avec Colossal, mon plus grand combat a été de trouver une raison pour laquelle les humains et les monstres restent connectés jusqu’à la toute fin du film.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'espagnol)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy