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IFFR 2020 Bright Future

Mladen Kovačević • Réalisateur de Merry Christmas, Yiwu

"Je voulais faire un film sur les complexités de la vraie Chine"

par 

- Nous avons discuté avec le réalisateur serbe Mladen Kovačević, qui présente le documentaire Merry Christmas, Yiwu en première mondiale dans la section Bright Future de Rotterdam

Mladen Kovačević  • Réalisateur de Merry Christmas, Yiwu

Nous nous sommes entretenus avec le cinéaste serbe Mladen Kovačević, dont le nouveau documentaire, Merry Christmas, Yiwu [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Mladen Kovačević
fiche film
]
, vient d’être présenté en première mondiale dans la section Bright Future du Festival international du film de Rotterdam. Nous avons interrogé le réalisateur sur son film.

Cineuropa : Quand avez-vous découvert Yiwu, et quand et pourquoi avez-vous décidé d’en faire le sujet d'un film ?
Mladen Kovačević : Je savais que je souhaitais faire un film sur les complexités de la vraie Chine, pas sur ses curiosités, un film qui explore la vie quotidienne de gens ordinaires sans ambitions particulières. Je savais aussi qu'il me fallait une histoire qui puisse être rendue de manière explicite par les moyens du cinéma, qui puisse être racontée de manière logique et naturaliste. C'est là que j’ai entendu un journaliste chinois parler de la ville de Yiwu, qui comprend plus de 600 usines qui produisent plus des deux tiers des décorations de Noël du monde entier.

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Ces produits sont reconnaissables de tous même s’ils sont à moitié réalisés par les mains dans travailleurs chinois. Ils nous ramènent à la sensation des fêtes familiales les plus intimes : Noël et le Nouvel An. Tout cela a une pertinence émotionnelle évidente pour le public occidental. C’est le bon état d’esprit à avoir pour explorer la vie des Chinois qui les fabriquent avec un regard d'Occidental. Ce qui m’a surpris lors des projections à Rotterdam, c’est l’émotion que le film a suscitée auprès des Chinois dans le public. Mon intention de faire un film sur la Chine ordinaire et réelle ne s’est pas perdue en chemin ; nous n’avons pas dévié en nous laissant séduire par ce décor extraordinaire.

Comment avez-vous eu accès à ces usines, et même aux maisons des gens qu'on suit dans le film ?
En termes de logistique, nous avons eu du soutien de la part des partenaires de production locaux, qui ont facilité la recherche et l’accès initiaux. Par ailleurs,  l’équipe de tournage était majoritairement chinoise, ce qui a constitué un autre atout important : cela donnait l’impression qu’il s’agissait d’une production chinoise, et les gens étaient donc moins soupçonneux. Quant aux usines, elles sont privées, de sorte que tant que le propriétaire n’y voyait pas d'objection, nous n’avions besoin d’aucun permis supplémentaire.

Dans la plupart des endroits où nous avons tourné, en comptant ceux des lignes narratives qui n’ont pas été incluses au montage final, les propriétaires des usines étaient aussi dans le film. Ensuite, une fois qu’un certain niveau de confiance avait été établi, une étape très naturelle dans le processus de narration de l’histoire de la vie quotidienne des ouvriers et des patrons d’usine était de poursuivre le film là où ils vivent, c'est-à-dire soit dans des dortoirs d’usine, soit dans les maisons adjacentes. Ces personnages vivent dans le "décor de film" d'usines de Noël ; leurs routines et leurs histoires personnelles sont entièrement liées au thème du film, et c'est pour cela que le récit dans son ensemble est ressorti sans qu'il soit besoin de forcer.

C'est un film étonnant, dans le sens où il n'explore pas des faits et événements survenant dans un lieu et dans le cadre d'une industrie qui n'ont jamais été filmés auparavant, mais présente malgré tout un mode de vie très étranger à ce que connaissent les Occidentaux.
Je ne crois pas que le cinéma serve à informer ou éduquer. Documentaire ou fiction, le cinéma est là pour offrir une expérience cinématographique, pour raconter une histoire. Si cette expérience vous apprend quelque chose, formidable. Quand ce qui m'intéresse, ce sont les faits, je lis les journaux ou des livres factuels ; dans le cinéma, ce sont les histoires intimes qui m'intéressent, et en effet, la manière dont les gens vivent se révèle à nous, du moins dans les limites de l'histoire.

Ces usines sont comme de grandes cellules familiales. Les ouvriers viennent souvent de la même région reculée et ils se retrouvent à travailler ensemble dans la même usine et à partager les dortoirs avec leurs cousins et leurs meilleurs amis. Dans ces usines, des couples se créent, des familles se forment et des enfants grandissent. Les travailleurs peuvent s'offrir les tout derniers iPhones, on voit bien que ces usines ne sont pas des ateliers clandestins, mais malgré tout le travail y est difficile. La production de Noël est à son maximum l'été, quand la température à Yiwu est de 40 degrés. Certaines usines sont remplies de vapeurs chimiques provenant de plastiques ou de teintures, et des paillettes flottent partout dans l'air. On ne peut jamais vraiment trouver un peu de paix ou d'intimité, ni dans les usines, ni dans les dortoirs. Ce n'est pas une vie facile, et c'est pour cela que la plupart des jeunes cherchent des opportunités ailleurs, surtout que dans la Chine d'aujourd'hui, les opportunités sont partout.

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(Traduit de l'anglais par Alexandre Rousset)

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