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CANNES 2021 Quinzaine des Réalisateurs

Antoneta Alamat Kusijanović • Réalisatrice de Murina

“L’eau est un endroit où mon personnage est libre, mais c’est aussi là qu’elle peut verser du sang”

par 

- CANNES 2021 : C’est un été cruel qui guette l’adolescente Julija, dans ce film par la réalisatrice originaire de Dubrovnik, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs

Antoneta Alamat Kusijanović  • Réalisatrice de Murina
(© Maja Medic)

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fiche film
]
, projeté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, la réalisatrice originaire de Dubrovnik, Antoneta Alamat Kusijanović s’intéresse à la jeune Jilija (Gracija Filipović), qui en a assez d’un père autoritaire (Leon Lučev) et d’une mère passive (Danica Čurčić). Mais lorsqu’un ami appartenant à un passé plus heureux fait son apparition, apportant avec lui les rêves du vaste monde, elle ne peut plus cacher ses sentiments.

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(comporte quelques spoilers mineurs)

Cineuropa : Il est surprenant de voir autant de visages familiers parmi les acteurs, de Danica Čurčić à Cliff Curtis en passant par le néerlandais Jonas Smulders.
Antoneta Alamat Kusijanović :
J’espère avoir à nouveau l’occasion de tourner avec Jonas, parce que ça a été un réel plaisir. C’était une idée de mon directeur de casting, car au début, j’avais autre chose en tête. Je cherchais, en fin de compte, quelqu’un qui ait l’air un peu dangereux, mais avec quelque chose de chaleureux en lui aussi. Jonas incarnait tout cela à la perfection. Il est séduisant sans faire peur pour autant. Il nous permet de mieux comprendre le personnage de Julija, je pense.

L’été est la période idéale pour que toutes les frustrations remontent à la surface. Mais aviez-vous toujours envisagé cette histoire comme une histoire d’été ? Il a y un contraste tellement saisissant entre la beauté des lieux et la tristesse de l’héroïne.
C’est exactement ce que je voulais. Nous imaginons toujours que les histoires où il est question de violence et de tensions se passent dans de sombres ruelles, au cœur de la misère. Or la violence est partout. La manière dont la nature progresse dans le film est intéressante. On part de quelque chose de frais, comme l’eau, puis on s’enfonce. Même la nature est violente ici, la nature à l’intérieur d’eux comme la nature environnante.

L’isolement physique de cette famille était l’un des outils qui ont aidé l’histoire et qui ont renforcé leur isolement émotionnel. Quand vous ne pouvez pas comparer votre situation à autre chose, vous vous habituez à la violence. Vous ne pouvez pas y mettre un terme. Elle fait partie de votre quotidien. Et quand cet étranger arrive, il apporte ce contraste. Il devient ce miroir. C’est à ce moment-là que la maltraitance est visible, du moins pour eux.

La fille et la mère ont davantage l’air d’être des sœurs ou des co-conspiratrices. Certaines de leurs conversations sont très intimes.
Je trouve fascinant de voir que, selon le milieu culturel qui est le leur, les gens n’interprètent pas le film de la même façon. Par exemple, pour beaucoup de Croates, cette famille n’a rien de violent. Vous, qui venez d’ailleurs, êtes plus sensible à cela, tout comme moi. J’ai quitté le pays très tôt pour aller étudier à l’étranger. Dans mon pays, le chauvinisme est tellement ancré que nous le confondons avec notre mentalité. Ce n’est pas notre mentalité, et il est important de le montrer. Pour un grand nombre de femmes en Croatie, qui deviennent mères très jeunes, c’est une relation normale. Pour moi, la limite a été franchie. Nela (interprétée par Čurčić) est une parfois une mère, et la plupart du temps, une amie.

Était-il difficile d’avoir une héroïne si réservée ? On ne sait pas si elle est simplement une adolescente normale, qui passe son temps à bouder, ou si elle est réellement en souffrance.
Elle est sinistre et mystérieuse. C’est la raison pour laquelle je l’ai choisie et je l’ai gardée telle quelle. Je ne voulais pas qu’elle nous raconte tout. Elle avait cette aptitude à retenir l’intérêt du public. Si on regarde bien, tout est très simple, du moins en matière d’intrigue. Les histoires qui se déroulent dans un environnement familier m’intéressent, mais celles dans lesquelles les personnages se révèlent être complètement différents de ce qu’on attendait. Le public peut alors se dire : "oh, ce n’est qu’une ado casse-pieds. Ou attendez, peut-être pas finalement." Quelque part dans tout ça se cache un traumatisme.

Tant de moments se passe dans l’eau ou sous l’eau. Il semblerait que ce soit là qu’elle puisse être libre, non ?
L’eau est un univers différent dans le film, physiquement et émotionnellement. J’ai toujours considéré l’eau comme étant leur subconscient. C’est un endroit où Julija est libre, mais c’est aussi là où elle peut blesser. Elle peut prendre ce qu’elle veut, couper le cordon avec ses deux parents. Elle trouve la force de renaître et de remonter à la surface.

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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