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VENISE 2022 Orizzonti

Antonio Lukich • Réalisateur de Luxembourg, Luxembourg

“Chacun de nous aime et déteste tout à la fois ses parents”

par 

- VENISE 2022 : rencontre avec le réalisateur ukrainien pour parler de son deuxième long-métrage, qui dans un sens, prolonge le premier, My Thoughts Are Silent

Antonio Lukich • Réalisateur de Luxembourg, Luxembourg

L’histoire du nouveau film d’Antonio Lukich, Luxembourg, Luxembourg [+lire aussi :
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, à l’affiche dans la section Orizzonti à la Mostra de Venise, se déroule dans la ville de Loubny, dans la région de Poltava en Ukraine. Les héros sont des frères jumeaux, dont l’un est policier et l’autre chauffeur de bus et vendeur de marijuana. Or, quelque part au Luxembourg, leur père, un homme qu’ils n’ont pas vu depuis l’âge de six ans, est en train de mourir. Nous avons discuté avec Lukich de ses motivations à faire le film, de ses influences et du dialecte singulier dans lequel le film a été tourné.

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Cineuropa : Vos deux films forment-ils pour l’instant une sorte de diptyque ? Était-ce quelque chose que vous souhaitiez faire depuis le début ?
Antonio Lukich : Le premier long métrage que j’ai réalisé était sur ma mère et un grand type, le deuxième sur mon père et un petit gars. Donc, oui, on peut dire qu’ils forment, inconsciemment en tout cas, une sorte de diptyque. Il m’a toujours semblé que chaque histoire était unique. Notre naissance est déjà un miracle en soi, et en tant que cinéaste, j’explore la nature du miracle de la vie. C’est la raison pour laquelle je pense que nous devons partager notre histoire personnelle, car, les héros de ces drames archétypaux sur la "recherche du père" ne parlent pas à chacun de nous.

Pourquoi avoir confié les premiers rôles aux membres de Kurgan & Agregat ?
Pour plusieurs raisons : d’abord, ce sont de véritables jumeaux, ensuite, ils ne sont pas très grands et pour ce film, il était primordial d’avoir des gens de petite taille. Et puis, ils parlent un dialecte rare, le sourjyk, et je voulais réellement raconter une histoire sérieuse dans cette langue. Je me suis lancé le défi de donner à ce dialecte un caractère sérieux, pour que les spectateurs puissent ressentir la gravité et la sincérité. Jusqu’à présent, le sourjyk faisait juste rire, et si l’on considère le cinéma soviétique comme un instrument de propagande, les personnages qui s’exprimaient dans ce dialecte n’étaient en général ni intelligents ni séduisants. Or, je voulais intégrer ces deux aspects à l’histoire pour apporter à ce dialecte plus d’intelligence, de beauté et de sérieux à la fois. Et enfin, ajoutons que ces deux garçons ont un talent comique inné. La comédie est quelque chose de naturel pour eux. Et comme dans mon premier film, j’ai utilisé une méthode particulière pour choisir mes comédiens, à savoir confier à un acteur comique un rôle dramatique.

Dans quelle mesure cette histoire est-elle autobiographique ? Il y a à la fin une dédicace à votre père…
En fait, l’histoire s’inspire de la vraie vie et elle a ensuite été retravaillée avec l’aide de mon directeur de la photo. Il s’agit plus ici d’une métaphore de la vie. Nous ressentons tous une ambivalence affective pour nos parents, c’est-à-dire que nous les aimons autant que les détestons. Cette relation d’amour mêlé de haine concernait cette fois des jumeaux. En réalité, je connaissais très mal mon père, ce qui a été le moteur du film.

Comment avez-vous écrit les blagues dans lesquelles on reconnaît si bien la vie quotidienne en Ukraine ? Vous êtes-vous contenté de noter ce que vous observiez en vous promenant ?
Selon moi, la principale qualité d’un réalisateur est sa capacité d’observation. Il doit également avoir une bonne mémoire et savoir manipuler les gens. Donc, il est évident que je me suis beaucoup inspiré de la vraie vie.

Il semble y avoir une référence à Woody Allen dans la scène de la patinoire. Était-ce volontaire de votre part ? Quels réalisateurs vous ont également inspiré ?
Annie Hall est incontestablement sur la liste des meilleurs films jamais réalisés sur l’amour. Mais, pour être honnêtes, nous ne nous en sommes pas inspirés tant que ça. C’est juste l’une de mes techniques préférées : vous mettez un acteur dans un environnement qui n’est pas le sien et vous vous contentez de l’observer. La mission du réalisateur est de faire sortir l’acteur de sa zone de confort, et de le filmer tenter de se sortir d’une situation inconfortable. De nombreux réalisateurs très appréciés, dont le travail a été une source d’inspiration pour moi, utilisent cette méthode, les frères Coen par exemple, mais également Mike Leigh, Ken Loach, Istvan Szabo et peut-être surtout Milos Forman.

Avez-vous envie de vous essayer à un autre genre que celui de la dramédie ?
Je ne dirais pas que le terme "dramédie" convienne au genre de films que je réalise, mais je laisse cette réflexion aux critiques de cinéma. Jusqu’à présent, depuis le début de la guerre, j’ai eu le sentiment que j’aurais du mal à proposer une comédie. Ceci étant dit, la demande existe ce qui laisse penser qu’à l’avenir, le cinéma va se répartir de deux façons différentes en Ukraine : il y aura le "divertissement", comme l’était le cinéma américain des années 1950 et le "néoréalisme", comme dans l’Italie des années 1940.

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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