email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

BLACK NIGHTS 2022 Compétition films baltes

Giedrius Tamoševičius • Réalisateur de The Poet

“Les instincts et sentiments basiques de l’Homme ne sont pas affectés par le temps, mais nous pouvons les analyser et tirer nos propres conclusions”

par 

- Le réalisateur lituanien nous parle de son nouveau film, co-écrit avec Vytautas V. Landsbergis, sur un instituteur récemment muté qui arrive dans une école dans un village isolé en 1947

Giedrius Tamoševičius • Réalisateur de The Poet

Nous avons interviewé le réalisateur lituanien Giedrius Tamoševičius sur son film The Poet [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Giedrius Tamoševičius
fiche film
]
, qui vient de gagner le titre de meilleur film de la compétition balte du Festival Black Nights de Tallinn (lire l'article).

Cineuropa : Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette histoire ? À quelles sources avez-vous recouru pour élaborer le film ?
Giedrius Tamoševičius : J’ai grandi avec la poésie d'après-guerre du poète lituanien Kostas Kubilinskas. Il a créé un univers de personnages magiques, d'animaux qui parlent et de gens qui suivent leurs émotions. Ses poèmes, récits et chansons sont pleins de lumière, d’amour pour sa mère et pour la nature. Un poète qui crée autant de beauté est forcément une bonne personne ; personne ne remet jamais ça en question. Et pourtant, dans les années 1990, quand la Lituanie a retrouvé son indépendance par rapport à l'Union soviétique et que les archives du KGB ont été rendues publiques, on a appris que Kostas était un agent du KGB qui avait trahi de nombreux innocents et partisans, et même tué des gens. Une nouvelle aussi choquante mine complètement la base des valeurs qu’on pouvait avoir.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Cette controverse m'a beaucoup inspiré pour faire le film. Il a fallu faire des recherches sérieuses, pour creuser tous les détails, comprendre les circonstances de l’époque et rassembler les pièces de la mosaïque qu'est la vérité. Je voulais trouver des réponses quant aux raisons de tout cela, et aussi pour comprendre si ça aurait pu être évité. J’ai passé beaucoup de temps aux archives du KGB. Nous avons directement contacté des historiens et des experts, et parlé à des proches de l'écrivain ainsi qu'à des témoins. Nous avons aussi analyser les carnets de bord des partisans qui ont souffert à cause de lui.

Quelle était la dynamique de l'écriture du scénario à quatre mains avec Vytautas V. Landsbergis ?
Quand Vytautas a suggéré qu'on fasse un film sur Kostas, j'ai d’abord senti le besoin de compléter la connaissance que j'avais de sa vie et de la difficile période de l'après guerre. Vytautas est écrivain, alors il comprend les nuances de l'archétype de l'écrivain (les spécificités de la poésie) beaucoup mieux que moi. Le thème de la résistance partisane face aux soviétiques est aussi très important pour lui. Cependant, c'est un sujet très glissant car on peut facilement céder à la tentation de faire des soviétiques les méchants et des partisans les héros. On laisse peu de place à l’être humain faillible qui hésite.

Développer le film a été un long parcours de transformation et de controverse, mais une chose était claire : il fallait qu'il y ait un conflit entre les deux côtés, entre les soviétiques et les partisans. La chose la plus intéressante, quand on analyse la biographie de Kostas, est que pendant longtemps, il s'est gardé de décider quel côté il voulait soutenir pour se contenter de s'adapter aux circonstances changeantes et de survivre. Le personnage de l'indécis qui s’adapte toujours au contexte était très pertinent dans le cas de notre histoire, et il présentait un fort potentiel dramatique.

Une fois que l’image du personnage central a été définie, il nous fallait un contrepoids : un antagoniste à parts égales. Nous l’avons basé sur des faits autobiographiques sur trois commandants partisans qui ont vraiment existé, et c'est ainsi que le commandant partisan Tauras a vu le joue : il est le symbole du combattant pour la liberté qui comprend aussi la valeur de la poésie et son impact moral sur les gens.

Donatas Želvys est une vraie découverte. A-t-il été difficile pour lui de préparer ce rôle ?
Donald est indéniablement une révélation. C’est un acteur extrêmement responsable qui s'immerge en profondeur dans chaque détail du scénario ou des dialogues. Il le vit dans chaque cellule de son corps. Pendant la préparation et le tournage (qui a duré presque un an), Donatas a vécu la vie d’un poète : il s'est plongé dans le travail de Kostas Kubilinskas et dans les détails de sa biographie. Il a très peu mangé, beaucoup fumé, évité le soleil et pris l’apparence d’un homme ensommeillé. Même sa manière de marcher et de se tenir a changé. Il est gaucher, mais pour incarner un poète de cette époque, il a appris à écrire de la main droite. Et ce ne sont là que les changements physiques. Psychologiquement, il s'est tout autant préparé. Ça a été un grand plaisir de travailler avec un tel acteur.

Voyez-vous des liens entre le film et le temps présent ?
Il y a forcément des liens, car l’histoire tend à se répéter. Personne ne s'attendait à la guerre et voilà qu'on retrouve les mêmes mécanismes (la coercition, la peur, la violence et la propagande) et qu'ils opèrent de nouveau selon exactement les mêmes principes. Les instincts et les émotions primaires de l'Homme ne changent pas avec le temps, mais on peut les analyser et en tirer ses propres conclusions.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy