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SUNDANCE 2023 Compétition World Cinema Documentary

Roman Liubyi • Réalisateur de Iron Butterflies

“MH17 est, pour moi, une des raisons qui a mené à l’invasion totale”

par 

- Nous avons discuté avec le réalisateur ukrainien de l’arrière-plan de son film, qui enquête sur le crash du vol MH17 de la Malaysian Airlines dans la région de Donetsk

Roman Liubyi • Réalisateur de Iron Butterflies

Au cours de l’été 2014, les champs de tournesols et les mines de charbon de l’est de l’Ukraine se sont transformés en scène de crime. Aujourd’hui avec Iron Butterflies [+lire aussi :
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, Roman Liubyi a réalisé un film sur cette atrocité. Le film est présenté dans la section Compétition World Cinema Documentary à Sundance. Nous avons discuté avec le réalisateur de cette enquête à plusieurs degrés sur la destruction du vol MH17.

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Cineuropa : On se souvient encore de War Note [+lire aussi :
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, votre film précédent. À quel moment et où vous est venue l’idée d’Iron Butterflies ?
Roman Liubyi : Après War Note, voire pendant le tournage, je travaillais, pourrait-on dire, sur une commande en collaboration avec le Service de sécurité ukrainienne. Je réalisais des courts-métrages à partir de documents provenant d’affaires judiciaires concernant les plus grands crimes de guerre de l’époque. Ils s’agissaient de films sur le bombardement de Volnovakha et celui du quartier de Skhidniy à Mariupol, datant tous les deux de 2014. Cette expérience était tellement inhabituelle. Il était évident que tout ceci allait déboucher sur quelque chose de bien plus important, et logiquement, c’était l’affaire du MH17. La seule chose à laquelle nous nous attendions avec mon équipe, c’était de travailler dans le genre du documentaire pur. Mais il est vite apparu que nous n’aurions pas d’accès privilégié et que nous allions devoir travailler avec ce qui se trouvait sur le net. C’est comme ça que ça a commencé.

Quels matériaux avez-vous utilisés pour le film ? Était-ce ce qui était disponible sur Internet, les documents judiciaires et la propagande russe ?
Au début, nous n’avons pas pensé aux tribunaux. Nous étions présents à la première conférence de presse de l’équipe d’enquête conjointe, et c’est après que nous avons décidé d’assister à la première audience du procès. Dès que nous avons eu un aperçu de ce que c’était de l’intérieur, il est devenu évident que nous devions l’utiliser dans le film. Mais au départ, il ne s’agissait que de vidéos accessibles à tous, disponibles sur le Net, des vidéos de témoins oculaires et des messages interceptés par le service de sécurité ukrainienne postés en ligne.

Où avez-vous obtenu les premières images d’archives de la construction du système de missiles antiaériens BUK ?
Cela a été une étape importante de notre travail. C’est Yaroslav Shaposhnyk, un grand expert en matière d’archives, qui a traité les images. Nous avons commencé par visionner tout ce qui concernait de près ou de loin les systèmes de défense aérienne dans les archives de l’état de Pshenychny, mais nous n’avons rien trouvé. Il y a ensuite eu un long processus de déclassification de documents des archives industrielles du ministère de la Défense, dans lesquelles nous avons trouvé beaucoup d’éléments très intéressants. Je peux vous affirmer que nous n’avons pas été en mesure de voir tout ce qui a été déclassifié pour nous. Ce que nous avons trouvé lors de notre première visite était plus que suffisant.

De plus, nous y avons trouvé des cas très intéressants de lavage de cerveau du personnel de l’armée soviétique que j’ai également utilisés dans le film. Je parle de films réalisés par le ministère de la défense russe sur des officiers de la défense aérienne. Les rôles étaient interprétés par des acteurs. Il y avait celui qui rêvait d’épouser une belle blonde, le rôle du commandant cool avec qui on va pêcher, celui du fils qui aime son père. Nous avons aussi trouvé ce genre de chose dans les archives industrielles.

Le terme "iron butterfly" (papillons de fer) est-il réellement utilisé ? Est-ce un terme technique ou un titre poétique ?
C’est la manière la plus succincte de décrire avec précision ce qui a tué 298 personnes, des éclats de missile BUK en forme de cubes et de papillons. Le "iron butterfly" est l’élément du missile qui frappe la cible. C’est le nom qui me paraissait le plus approprié, car il est à la fois agressif et sombre.

Votre film a été sélectionné à Sundance, mais également à la Berlinale. Dans la mesure où une guerre de grande envergure est en cours, vous attirez l’attention sur ce crime russe en particulier. Pensez-vous qu’il soit encore d’actualité aujourd’hui ? Les crimes commis aujourd’hui sont bien plus importants…
L’ampleur de ces crimes est complètement différente. Mais cette affaire demeure très importante à l’échelle internationale. Cette attaque russe a touché des citoyens de différents pays, voire de différents continents. Dans ce film, je mets sur un pied d’égalité les 298 passagers et membres d’équipage et le reste des victimes du conflit russo-ukrainien. Ils n’ont pas de statuts particuliers. Ils sont, avec les Ukrainiens, victimes de l’agression russe. Je pense qu’il est primordial, en gardant cela en tête, de dire que cette guerre n’a pas commencé en 2022, mais bien en 2014. Nous devons le comprendre et être conscients que nous avons perdu beaucoup de temps. MH17 est selon moi une des raisons qui a mené à l’invasion totale.

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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