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Belgique

Dominique Deruddere • Réalisateur de The Chapel

"Le talent, est-ce que c’est une bénédiction, ou une malédiction ?"

par 

- Rencontre avec le réalisateur belge, qui revient avec un nouveau long métrage haut en tension dramatique

Dominique Deruddere  • Réalisateur de The Chapel

Dominique Deruddere, candidat aux Oscars en 2000 avec Everybody’s Famous, revient avec The Chapel [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Dominique Deruddere
fiche film
]
, présenté en ouverture du Festival d’Ostende, drame psychologique qui suit une jeune pianiste virtuose en lice pour la finale du prestigieux concours Reine Elisabeth, en proie à ses propres démons intérieurs.

Cineuropa : Quelles sont les origines du projet ?
Dominique Deruddere :
Il y a quelques années, je travaillais sur un scénario avec le romancier français Erik Orsenna. Un soir, alors qu’on regardait la finale du Concours Reine Elisabeth, il me dit : "C’est quand même étrange que les cinéastes belges ne se soient jamais emparés du concours Reine Elisabeth, c’est un vrai sujet de film !"

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Je sentais bien qu’il avait raison, mais à part un whodunnit du genre : "Ils sont 12, enfermés dans une maison, l’un d’entre eux meurt", je n’avais pas de (vraie) bonne idée. Quelques années plus tard, mon plus jeune fils s’est mis à jouer du piano, de façon très appliquée. Il travaillait 6 à 7 heures par jour, il était extrêmement concentré. C’est un rapport particulier qui se nouait avec lui, et qui m’a ramené aussi à mon propre rapport avec mes parents quand je leur avais annoncé que je voulais faire du cinéma. C’est là que l’idée du scénario s’est cristallisée.

Comment nait une vocation artistique, et à quel point elle nous appartient ?
Le talent, c’est une question qui m’intéresse, j’en parlé déjà, dans mon film Everybody’s Famous, l’histoire d’une fille qui n’avait aucun talent, mais voulait y arriver à tous prix. Ici, on a une fille qui elle a beaucoup de talent, mais doit surmonter des très forts obstacles pour y arriver. Le talent, est-ce que c’est une bénédiction finalement, ou une malédiction ? Est-ce que ça en vaut vraiment la peine ?

Jennifer rencontre des obstacles extérieurs, mais surtout des obstacles intérieurs ?
Oui, sans trop en dire, ce sont ses propres traumas qu’elle doit surmonter. Elle est tourmentée par un souvenir vague, et une fois isolée dans la chapelle, le lieu de répétition pour le concours, elle voit ses souvenirs remonter à la surface. Elle finit par comprendre ce qui s’est passé à l’époque avec ses parents.

Justement, comment s’articule cette relation aux parents, et à qui appartient le rêve de succès, finalement ?
C’est quelque chose que je vois quand je tourne avec des enfants. Les parents sont présents sur les plateaux, et ce sont souvent eux les plus nerveux. Je crois que les parents peuvent nourrir le talent comme ils peuvent le détruire. Souvent, les enfants servent à satisfaire le rêve des parents, à réparer leur frustration. Dans le cas de Jennifer, c’est une vraie vocation. J’ai parlé avec beaucoup de participants au concours, et quand je leur demandais quand ils avaient commencé à travailler pour le concours, ils me répondaient souvent : "Mais depuis que je suis né !" C’est quelque chose qu’ils veulent profondément, mais la pression des parents n’est pas toujours bienvenue, et peut même détruire le goût de faire quelque chose. 

Peut-on parler de cette arène narrative incroyable : des participants extrêmement passionnés, la compétition, et puis la Chapelle, le lieu où sont réunis tous les "adversaires" pendant les quelques jours qui précèdent la finale. Un cadre narratif idéal avec une unité de temps, de lieu, et un parfait mélange de protagonistes.
C’est une configuration très originale, il n’y a que des Belges qui pouvaient inventer ça ! C’est entre le masochisme, et le machiavélisme. Il y a beaucoup de belles amitiés qui se créent, mais aussi des inimitiés. Dans les années 80, l’un des participants n’a pas dit un mot pendant toute une semaine ! C’est une arène incroyable même si finalement la seule chose qu’ils font, à part manger, c’est jouer du piano. Mais le milieu crée la tension. Ce n’est pas un thriller, mais c’est un drame avec du suspense. C’est avant tout une tension psychologique. Un simple mot peut faire basculer nos personnages.

Qu’est-ce qui caractérise Jennifer ?
C’est quelqu’un qui ne communique pas du tout, elle est enfermée dans son trauma, elle est très froide. Ce genre de film dépend énormément de la performance du personnage principal. Il me fallait la comédienne parfaite. Je crois que j’ai vu toutes les comédiennes flamandes entre 20 et 30 ans ! J’ai eu énormément de chance de rencontrer Taeke Nicolaï. Elle n’était pas pianiste, alors elle a répété et répété pour avoir les bons mouvements des bras, mais aussi du reste du corps, pour se laisser habiter par la musique.

Le plus grand challenge pour vous ?
C’était que le piano ait l’air vrai ! Souvent avec les films qui parlent de musique, on n’y croit pas. Ici, on voulait que le spectateur oublie que c’est une actrice, qu’on croit qu’elle joue avec l’orchestre.

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