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NAMUR 2025

Mélissa Drigeard • Réalisatrice du Gang des Amazones

"Il me fallait des actrices avec lesquelles on n’aurait aucun mal à se dire: ah oui, elle, elle pourrait braquer une banque !"

par 

- La cinéaste française nous parle de son dernier long métrage, inspiré d’une histoire vraie, et servi par un impeccable quintet de comédiennes

Mélissa Drigeard • Réalisatrice du Gang des Amazones
(© Lore Thouvenin/FIFF Namur)

Le 40e Festival International du Film Francophone de Namur s’est achevé avec la projection en avant-première belge du nouveau film de Mélissa Drigeard, Le Gang des Amazones [+lire aussi :
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, inspiré de l’histoire vraie de fin jeunes femmes ayant braqué une demi-douzaine de banques au début des années 90 dans le Sud de la France. Un film à la croisée des genres, qui cherche à comprendre sans excuser comment et pourquoi braquer des banques est apparu comme la meilleure des solutions à ces jeunes femmes "rangées".

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Cineuropa : Quelles sont les origines de ce projet ?
Mélissa Drigeard :
C’est mon co-auteur Vincent Juillet qui m’a parlé de cette histoire incroyable après avoir entendu un épisode d’un podcast consacré aux affaires criminelles. Je me suis demandé pourquoi le grand public ne connaissait pas ces femmes, alors que ce n’est pas rien, comme cas de grand banditisme. J’ai contacté l’une d’entre elles, Hélène Trinidad, je suis allée la voir et j’ai passé plusieurs semaines avec elle. Le film était lancé. Au départ de tout ça, il y a une erreur incroyable de la Caisse d’allocation familiale qui fait que du jour au lendemain, elle ne reçoit plus aucune aide, et bien qu’elle travaille de jour, et que sa mère travaille de nuit, les deux femmes n’arrivent plus à subvenir au besoin de leur foyer. J’ai trouvé fascinant qu’à ce stade de sa vie, braquer une banque devienne une solution.

C’est une histoire de la précarité au féminin.
Oui, les personnages sont dans une situation de misère sociale, parfois affective. Hélène, c’est une jeune mère célibataire. Et je me suis dit qu’aujourd’hui, il pourrait encore se passer la même chose. Pour autant, je ne voulais ni les juger (il y a eu un procès), ni en faire des héroïnes, ce qui était d’ailleurs aussi une façon de leur rendre justice.

Les personnages, devenues braqueuses, ont conscience qu’elles sont en train de battre en brèche les stéréotypes de genre. Vous aussi, en faisant le film ?
Oui, complètement. Très vite, les Amazones décident d’entrer dans les banques juste habillées comme des femmes, ce qui les rend insoupçonnables. Moi-même, quand j’ai commencé à chercher des références, je n’ai rien trouvé, pas de films de braquage au féminin. Ce que j’ai surtout essayé, c’est de faire un film sans fards, un peu âpre, surtout pas spectaculaire, parce que l’histoire l’est déjà.

Les Amazones sont à la croisée intersectionnelle des discriminations sexistes et classistes, le film lui ne colle pas un seul genre.
Oui, il est clairement chapitré comme l’ont été leurs vies, film social, braquage, film de prison, et film de procès ! A l’écriture, j’avais un peu de ça, que les genres se succèdent, mais un jour, mon co-auteur m’a dit : mais on ne raconte pas trois jours de leur existence, c’est leur vie qu’on raconte ! Et nos vies connaissent plusieurs genres. Ce que j’ai voulu, c’est vraiment rester du point de vue de filles, d’ailleurs, il y a beaucoup de plans séquences, et peu de contrechamps. Ce qui traverse tout ça néanmoins, c’est la violence, elles viennent de milieux où celle-ci est banalisée. Et l’époque était très misogyne, à tel point que les journaux, personne ne pouvait croire que ces braquages étaient le fait de femmes.

Le fait qu’on ne les soupçonne pas les pousse à recommencer, jusqu’à atteindre une forme d’hubris.
Elles se retrouvent prises dans un engrenage un peu fou. Pendant un an, elles se sont offerts ce qu’elles n’ont jamais pu s’offrir, et savent qu’elles ne pourront jamais plus s’offrir non plus. Le personnage de Katy incarne bien cette désillusion face à ce que lui offre la vie. Comment pourrait-elle avoir envie de retrouver sa vie d’avant ? Katy sait qu’elle ne peut compter que sur elle-même, et si c’est peut-être la plus sure d’elle du groupe, elle n’est pas tant le cerveau, qu’une sorte de mère, ou de soeur, celle qui prend soin.

Comment avez-vous pensé votre casting ?
J’ai écrit pour Lyna Khoudri, c’était donc un grand soulagement qu’elle accepte le rôle. Elle est douce et forte à la fois, et elle a une forme de noirceur dans le regard parfois qui peut être effrayante. J’étais aussi convaincue qu’avec Kenza Fortas, magnifique dans Shéhérazade [+lire aussi :
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, elles seraient de magnifiques soeurs de cinéma. Pour Hélène, j’avais envie du côté solaire d’Izia Higelin, elle est très enveloppante aussi. J’ai eu un véritable coup de foudre artistique quand j’ai découvert Mallory Wanecque dans Les Pires [+lire aussi :
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interview : Romane Gueret et Lise Akoka
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. Enfin pour Laura Felpin, une amie m’a soufflé son nom, et quand j’ai découvert son travail dans Les Complices, ça a achevé de me convaincre. Il me fallait des actrices non pas qui ressemblent aux vraies Amazones, mais plutôt avec lesquelles on n’aurait aucun mal à se dire : ah oui, elle, elle pourrait braquer une banque.

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