03/05/2017 - L’avant-première mondiale de ce film du réalisateur local Adonis Florides a marqué l’ouverture du Festival international de Chypre, à Limassol

La 15e édition du Festival international du film de Chypre s’est ouverte à Limassol avec l’avant-première mondiale de Rosemarie [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film] d’Adonis Florides, au programme de la compétition internationale Glocal Images (lire l’article). Rosemarie est le deuxième long-métrage du réalisateur indigène (qui vit et travaille à Limasssol), 14 ans après son premier film, Kalabush (2003), co-réalisé avec Theodoros Nikolaidis.

Le héros du film, Costas (Yiannis Kokkinos), était autrefois un talentueux écrivain, mais il gagne aujourd’hui sa vie en tant que scénariste d’un soap opéra à succès, Rosemarie. Après avoir emménagé dans un nouvel appartement, Costas vit l’angoisse de la page blanche et voit dégringoler l’audience de son feuilleton ringard, qu’il déteste en secret. Pour trouver de nouvelles idées, il décide d’observer ses nouveaux voisins, notamment la famille dysfontionnelle qui vit en face de chez lui. En se concentrant sur leurs problèmes et sur leur fille Chryso (Niovi Charalambous), il va trouver l’inspiration qui lui manquait et utiliser leur quotidien dramatique pour étoffer les personnages de son feuilleton télé. La situation devient vite déroutante, à mesure que Costas se rapproche de la famille et s’implique dans ses problèmes. Il va être obligé de trouver un équilibre entre sa vie par procuration et l’exploration de ses propres démons.

Comme le héros du film, Florides tente de trouver un équilibre entre des univers et des genres différents. Rosemarie est un drame qui comporte aussi des éléments de comédie et même parfois de thriller, du fait des penchants voyeurs du personnage principal. L’action, qui se déroule à Limassol et dans ses pittoresques alentours, est en fait une imitation de soap opera sophistiqué qui se moque de ses personnages trop lisses, tout en essayant de fournir une échappatoire à la réalité. Rosemarie est perché à l’extrême limite de la vérité, observant à la dérobée des événements tragiques qu’il romance et passe à travers le filtre d’une absurdité proprette, enjouée, et troublante. Cette guerre entre deux mondes amène inévitablement le spectateur à se demander à quel moment la fiction dépasse la réalité, bien qu’il faille noter que la mince frontière qui est maintenue entre les deux ne fonctionne pas tout le temps, et qu’associée à d’autres éléments du scénario, elle ralentit le rythme dynamique naturel du film.

Selon Florides, qui a aussi écrit le scénario, ce projet a débuté il y a presque dix ans. Il a requis de nombreuses ébauches avant de prendre sa forme définitive. La qualité principale du film est de tenter de présenter une analyse à plusieurs niveaux, s’attaquant en particulier à la société chypriote, fermée et parfois patriarcale, habituée à cacher les secrets de famille. Le réalisateur n’hésite pas à défier ses compatriotes en touchant à des sujets qui ne pourraient jamais être abordés dans un feuilleton local classique (c’est-à-dire conservateur et rongé par la culpabilité) : les orientations sexuelles fluctuantes, les relations “immorales”, la violence...

Rosemarie est un film provocateur qui conteste l’immobilisme de la société chypriote. Florides sonde ses limites tout en restant fidèle à l’une des citations de son personnage principal : tout doit être lavé au savon pour être désinfecté, idéalisé, emballé dans du papier brillant, puis vendu à une société de la mascarade qui tente d’ensevelir ses péchés.

Rosemarie a été produit par Marios Piperidis (ΑΜP Filmworks Ltd) en coproduction avec Andros Achilleos (Seahorse Film), avec le soutien du Ministre de l’Éducation et de la Culture de Chypre.

(Traduit de l'anglais)