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ASTRA 2018

Critique : Licu, a Romanian Story

par 

- Ce film d'Ana Dumitrescu, lauréat de la Colombe d'or de DOK Leipzig 2017, se penche sur la vision qu'a un nonagénaire du monde ; le film est au programme au Festival Astra, dans la section Mature View

Critique : Licu, a Romanian Story

Comme un nonagénaire considère-t-il le monde et se souvient-il de la vie et de l'Histoire. Dans le documentaire Licu, a Romanian Story [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
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, lauréat de la Colombe d’or du festival DOK Leipzig l'année dernière, la réalisatrice française de naissance roumaine Ana Dumitrescu tente de répondre à ces questions Le film est au programme du 25e Festival Astra (15-21 octobre, Sibiu), dans la section Regard mature. Le film est aussi en lice dans la section roumaine, dont les gagnants seront annoncés samedi après-midi.

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Il y a un proverbe roumain qui dit : "Celui qui n'a pas d'ancêtres sous la main devrait s'en trouver". Licu, a Romanian Story est l'équivalent cinématographique de ce proverbe, car il est centré sur un héros attachant et très pertinent à cet égard : le nonagénaire Liviu Canţer, surnommé Licu, qui vit dans une petite maisonnette à Sibiu, la ville où se tient le Festival Astra. Face à la caméra de Dumitrescu, Licu s'ouvre et partage sa vision de l'Histoire, du communisme, de l'amour et du deuil, mais il sert aussi de carrefour, immensément intéressant et tout à fait serein, entre la petite histoire individuelle et la grande Histoire nationale, et universelle.

À une époque où on semble n'avoir envie que de regarder en direction du futur, Licu nous tire gentiment par la manche pour suggérer que connaître et comprendre les erreurs du passé peuvent peut aider à paver le chemin pour un avenir meilleur. On acquiert de la sagesse grâce à l'expérience (et hélas souvent à travers la tragédie et le deuil), donc la moindre des choses qu'on peut faire pour cet homme est de faire attention à lui pendant un peu plus de 80 minutes, surtout qu'il a été, de première main, témoin de la tragédie de la guerre, de l'angoisse et la dureté du régime communiste, de l'enthousiasme de la révolution de 1989, de la difficile transition vers la démocratie et de la fragile stabilité du présent. Incontestablement l'homme a sur la vie et l'Histoire un angle d'approche bien plus large que la plupart d'entre nous. 

Cependant, ce film est plus qu'une longue conversation sur le passé. À travers le regard affûté de Dumitrescu et ses images en noir et blanc très contrastées, le documentaire compose un espace charmant sur duquel Licu, frêle et digne, règne paisiblement. À un moment, il se plaint d'être complètement seul au monde. "Ils n'ont pas vécu très longtemps", dit-il au sujet de ses chers disparus, parents et amis, mais grâce à la magie du cinéma, au pouvoir des histoires charmantes, venues du cœur, que raconte ce vieux monsieur, et à l'utilisation efficace que fait la réalisatrice de vieilles photos, le film est peuplés d'autres personnages. Loulou, la femme de Licu, devient l'héroïne d'une histoire d'amour adorable. Viorel, son frère, est la star d'une tragédie. Et Licu lui-même semble le héros d'un film d'aventures qui s'étale sur plusieurs décennies et au terme duquel sa survie le condamne à une vie solitaire. 

Il y a un plan dans le film où Licu dort si paisiblement qu'on se met à craindre qu'il ne soit mort. On regarde ses joues creuses, on remarque son dentier sur la table de nuit, mais il n'y a rien d'exploiteur ou d'invasif dans ce plan, parce que Dumitrescu ne se détourne pas de la réalité : aussi riche que la vie de cet homme ait pu être, la fin est sans doute très proche. En ce sens, le film fait figure de carpe diem, d'invitation à chérir chaque instant de nos vies, et apprécier quelque chose qu'on pourrait bien perdre très bientôt : la sagesse d'un homme qui a tout vu. 

Licu est peut-être vieux et sa maison est peut-être poussiéreuse, mais sa dignité, son courage, sa sérénité et sa chaleur humaine sont intemporelles.

Licu, a Romanian Story a été produit par Jules et Films. Les ventes internationales du film sont assurées par Taskovski Films. En Roumanie, il est sorti le 24 août, avec Rollercoaster PR.

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(Traduit de l'anglais)

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