email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

SAN SEBASTIAN 2019 Compétition

Critique : Lettre à Franco

par 

- Alejandro Amenabar reconstruit avec sa précision habituelle un moment décisif de l’Histoire de l’Espagne, mais il ne parvient pas à lui insuffler toute l'émotion et l’énergie que ce conflit demande

Critique : Lettre à Franco
Karra Elejalde dans Lettre à Franco

“Quand j’ai écrit ce scénario, quelqu’un m’a recommandé, après l’avoir lu, de ne pas le tourner, parce qu’une fois fini, il allait me valoir beaucoup d’ennemis", a déclaré Alejandro Amenabar juste avant une des projections spéciales de son nouveau film pour les membres de l’Académie du cinéma espagnole au moment où ils devaient choisir quel film représenterait l’Espagne à la prochaine édition des Oscars, après quoi ce travail a fait sa première mondiale au Festival de Toronto, ralliant dans la foulée le 67e Festival de San Sebastian, où il est actuellement en compétition. "Cependant, grâce à l’appui de mon producteur, Fernando Bovaira, nous avons continué avec ce projet et voilà le film fini. À présent, c’est à vous de d’estimer s'il valait la peine ou pas de le faire", a conclu le cinéaste avant d'être salué par des applaudissements nourris.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Dès le début de son tournage, à Salamanque, Lettre à Franco [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Alejandro Amenabar
fiche film
]
(Mientras dure la guerra – qui recrée dans la ville universitaire le conflit qu’a vécu Miguel de Unamuno quand il a voulu soutenir une mutinerie de l’armée contre le gouvernement républicain espagnol – a levé quelques sourcils : "Amenabar est en train de tourner un film sur la guerre civile ?", se sont demandé les plus méfiants. Cette incursion du méthodique cinéaste oscarisé pour Mar adentro [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
dans les pages de l’Histoire n’est pas si surprenante que cela : qu'était Agora [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
sinon un film politique (et anti-fanatisme) ?

Amenabar reste fidèle, dans Lettre à Franco, à la logique de sa carrière, très méditée et circonspecte dès le début, avec Tesis. Comme le titre de ce premier film l’indiquait, son cinéma repose sur des théories méticuleuses et des principes qu’il développe dans ses films. Le musicien et cinéaste se documente à fond sur les sujets qu’il aborde, il s'immerge dans tous leurs recoins et formules, et produit à partir de là des scénarios qui viennent à l’appui de thèses. C’est ce qu’il a fait avec Regression [+lire aussi :
critique
bande-annonce
making of
interview : Alejandro Amenábar
fiche film
]
et Abre los ojos, et il le démontre de nouveau dans un film qui se veut le miroir de ce moment politique et social qu'est en train de vivre le monde, avec la dangereuse ascension de l’extrême droite. C’est, de fait, un film de dénonciation et d’avertissement camouflé sous l’apparence d’un film de reconstruction historique.

De fait, la production n’a pas lésiné sur les moyens au niveau des costumes (confiés à Sonia Grande, la collaboratrice habituelle de Woody Allen), de l’embauche de figurants des lieux de tournage, très nombreux, et de la caractérisation des acteurs de la troupe, d'où ressort le trio principal, formé par Karra Elejalde, Eduard Fernández y Santi Prego, qui incarnent respectivement Unamuno, le général Millán Astray et le dictateur Francisco Franco lui-même. L’emballage du film est donc impeccable, mais est-ce que le contenu à la même hauteur ? Hélas, non. Le film, immaculé en terme de facture, est vide d’émotions, de risques, de spontanéité et même de suspense, de drame et de peur face au danger qui se rapproche. Tout est tellement calculé au millimètre, exécuté et pensé comme une thèse de doctorat parfaite pour être lue devant un tribunal de savants qui pourront juger son élaboration, que le film risque d'ennuyer les néophytes quant au sujet abordé. C’est à présent au public, qui est (presque) toujours fidèle au réalisateur des Autres, de dire s'il valait la peine ou pas de le faire.

Mientras dure la guerra est une coproduction entre l’Espagne et l’Argentine qui a réuni les efforts de Mod Producciones, Movistar Plus+, Himenóptero, K&S Films et Mientras dure la guerra A.I.E. Le film a été financé par l'ICAA (Ministère de la Culture espagnol) et l'INCAA (Argentine), avec la collaboration de la Ville de Salamanque et l’Université de Salamanque en son huitième centenaire. Le film, dont les ventes à l’étranger sont assurées par Film Factory Entertainment, arrivera dans les salles espagnoles le 27 septembre, distribué par Buena Vista International Spain.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'espagnol)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy