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JIHLAVA 2019

Critique : The Makavejev Case or Trial in a Movie Theater

par 

- Ce docu-fiction hybride par Goran Radovanović dévoile des enregistrements jusque là inconnus liés au scandale qui a contraint Dušan Makavejev à quitter la Yougoslavie

Critique : The Makavejev Case or Trial in a Movie Theater

Dans le docufiction hybride The Makavejev Case or Trial in a Movie Theater, le réalisateur serbe Goran Radovanović (Enclave [+lire aussi :
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) rend hommage à Dušan Makavejev, probablement le plus grand cinéaste yougoslave de tous les temps. Mais surtout, le film dévoile des enregistrements jusque-là inédits d’un événement qui a déterminé le destin du chef-d’œuvre du légendaire metteur en scène, W.R.: Misterije Organizma, dans son pays natal, et l'a obligé à partir. Le documentaire de Radovanović a gagné le prix du meilleur film de la compétition nationale à Belgrade FEST en février, un an exactement après la mort de Makavejev, et le voilà qui fait sa première internationale dans la section Between the Seas du Festival international du documentaire de Jihlava.

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En 1971, Makavejev est devenu le chouchou des critiques du monde pour avoir fait W.R.: Misterije Organizma, présenté aux festivals de Berlin et de Cannes. Cette réflexion sauvage et explicite sous forme de docufiction sur la relation entre le communisme et l’amour libre, inspirée des travaux du psychothérapeute marxiste controversé Wilhelm Reich, a suscité des réactions outragées dans la Yougoslavie de Tito. Un "procès public" a été mis en scène dans un cinéma de Novi Sad, où la projection du film a été suivie par un débat entre des professionnels du film et des petits cadres du Parti communiste, des représentants d’usines et de sociétés publiques.

Bien que les services de sécurité yougoslaves ait interdit tout enregistrement de l’événement, le preneur de son Slobodan Miletić est parvenu à faire entrer dans le cinéma l’équipement nécessaire et il a enregistré cinq bobines de matériel audio. Radovanović ouvre le film sur Miletić, équipement Nagra et micro à la main, arrivant au multiplex qui se tient à présent à la place du vieux cinéma d'alors. Deux jeunes gens amènent un pupitre, et un garçon fait rouler dans la salle, sur un skateboard, le buste de Tito.

Ce qui suit est une reconstitution artistique de la discussion où les professionnels du cinéma et critiques, y compris les plus proches du Parti, défendent le film, tandis que les "honnêtes communistes", les "spectateurs ordinaires" et les petits apparatchiks l’attaquent, le qualifiant de scandaleux, offensant, dégoûtant, anti-communiste et anti-soviétique. Le film se termine sur le discours de Makavejev lui-même, un joyau d’honnêteté, d’intelligence et de profondeur de vue qui révèle un marxiste sincèrement dévoué doublé d'un cinéaste incroyablement talentueux qui remet en question ses propres convictions.

Certaines des figures étroitement connectées au film et à cet événement sont filmés en train d’écouter les enregistrements d'époque, dans des segments à la mise en scène plus ou moins réussie. Celles-ci comprennent la star du film, l’actrice Milena Dravić (décédée en 2018), qui se tient à côté de sa propre photo à la Cinémathèque de Belgrade, et l’acteur Svetozar Cvetković, qui a joué plus tard dans Gorilla Bathes at Noon (1991) de Makavejev, face à la cage du chimpanzé du zoo de Belgrade.

Bien qu'il soit un peu trop direct dans ses métaphores, le film de Radovanović est un document précieux sur toute une ère. En même temps, inévitablement, bien qu’il n'inclue aucun commentaire, il amène à comparer ce qui se passe ici avec des événements qui se sont passés à la fois longtemps avant et longtemps après. Les travaux de Reich eux-mêmes ont été censurés et brûlés en 1956 aux États-Unis, où ce juif viennois s'était réfugié en 1939, de même qu'après 1971, Makavejev a été forcé d’aller faire ses films ailleurs.

À l’époque, le parti a eu l'intelligence de "laisser le peuple" juger le film – il n’y avait pas d’officiels de haut rang à l’événement. Le mécanisme s'est retrouvé ensuite dans le rôle belliqueux des médias dans les guerres yougoslaves des années 1990 et aujourd’hui, c’est le tribunal de la presse à scandale et des réseaux sociaux qui crée l’opinion publique et dirige l'outrage vers certains artistes et autres figures qui offensent un groupe spécifique dans la société, mais en premier lieu la majorité "morale" et "saine".

The Makavejev Case or Trial in a Movie Theater a été coproduit par les sociétés serbes Nama Film et Oktobar Film.

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(Traduit de l'anglais)

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