17/07/2021 - CANNES 2021 : C.B. Yi décrit les tourments intérieurs d’un prostitué gay avec des soucis familiaux dans le sud de la Chine

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bande-annonce
interview : C.B. Yi
fiche film] est un film stylé (quoiqu'un peu distant) sur les garçons qui exercent le plus vieux métier du monde. Le film commence comme un film de prostitués gays plutôt dans la vent, une sorte de Cruising très coloré, pourrait-on dire, avec une séance de shopping, des fêtes et des scènes de sexe. Cependant, il se mue progressivement en un conte contemplatif sur la famille et la rédemption, après un bond de cinq ans plus tard, suite à une dispute qui fait que Fei (Kai Ko) doit quitter le village où il travaillait. On parle ici du premier long-métrage du scénariste et réalisateur formé à l'Académie de cinéma de Vienne (où enseigne un certain Michael Haneke) C.B. Yi, projeté à Cannes dans la section Un Certain Regard.

Moneyboys, qui se passe dans le sud de la Chine bien qu'il ait été tourné à Taiwan, est un film qui joue sur les contrastes : les couleurs vives voire fluo des chemises hawaïennes et les images colorées qu’on voit à l’écran renvoient à une ambiance de fête qui tranche avec la fixité des plans et la caméra observationnelle, très respectueuse, qui donne à tout ce qui se déroule à l’écran un air mélancolique. Ces deux choix, téméraires, fonctionnent à l'unisson l'un avec l’autre pour refléter les différentes facettes de Fei, un jeune homme séduisant et élégant qui passe de l’état de jeune débutant chapeauté par Xiaolai (J.C. Lin) à celui de prostitué qui maîtrise la rue et réussit dans la grande ville. La police le traque constamment, dans un effort pour réprimer la prostitution masculine en Chine, ce qui signifie que Fei est constamment en mouvement. Il ne lui est jamais permis d'être lui-même, bien qu’il soit conscient que la facilité qu’il a à enfreindre la loi fait de lui une commodité d'autant plus précieuse.

La tristesse que Fei porte en lui devient le motif principal du film quand ce dernier entre dans une séquence qui montre sa relation avec sa famille, que Fei fait vivre en envoyant régulièrement de l’argent. Il revient dans son lieu natal pour rendre visite à son grand-père mourant, mais se fâche avec sa famille quand ils se mettent à l'asticoter sur la provenance de son argent. Ils n'ont aucun problème pour le dépenser, mais seulement tant qu'ils peuvent faire semblant qu'il est propre. Fei va de nouveau se remettre en mouvement vers la ville mais cette fois, il est suivi par son ami d’enfance Long (Bai Yufan), et une relation amoureuse s'épanouit entre eux, avec Fei dans le rôle du protecteur. L’arrivée du vieux copain d’enfance ajoute du sel à l’ensemble. Le retour de Xiaolai, que Fei voit toujours comme une sorte de gardien, est totalement prévisible. À ce stade, le film a déjà bien établi qu’il ne sera pas engageant, reflétant le refus de Fei de s'impliquer émotionnellement. La caméra du chef-opérateur Jean-Louis Vialard crée de surcroît un effet de distanciation, tandis que CB Yi essaie de nous attirer dans l’état d'esprit de son personnage.

Ko porte le film dans le rôle de Fei et parvient à le rendre intéressant presque malgré (et non à cause de) son style de mise en scène opaque. Moneyboys frappe parce que rares sont les films qui dépeignent l'homosexualité en Chine, et parce qu'il le fait avec une sensibilité et une chaleur humaine particulière par rapport aux tourments qu'être un marginal peut causer chez un individu. Cela dit, du fait de son rythme, le film plaira surtout à ceux qui aiment avoir beaucoup de place pour la contemplation tandis que les scènes se déploient.

Moneyboys est une coproduction entre l’Autriche, la France, Taiwan et la Belgique qui a réuni les efforts de KGP Filmproduktion, Zorba, Flash Forward Entertainment and Panache Productions. Les ventes internationales de ce titre sont gérées par Totem Films.

(Traduit de l'anglais)