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VENISE 2021 Orizzonti

Critique : Vera Dreams of the Sea

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- VENISE 2021 : Kaltrina Krasniqi s’inscrit dans, voire au-dessus de, la vague des réalisatrices kosovares dont les films traitent de la position des femmes dans leur société

Critique : Vera Dreams of the Sea
Teuta Ajdini Jegeni dans Vera Dreams of the Sea

Ces dernières années, un bon nombre de réalisatrices kosovares se sont faites remarquer dans le circuit des festivals, pour des films qui traitent de la position des femmes dans la société de ce petit pays (sans oublier non plus le film à thématique gay The Marriage [+lire aussi :
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de Blerta Zaqiri, réalisé en 2017, une oeuvre pionnière en la matière), mais 2021 marque une véritable explosion, avec Hive [+lire aussi :
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de Blerta Basholli, récompensé à Sundance, Looking for Venera [+lire aussi :
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de Norika Sefa, Prix spécial du jury à Rotterdam et The Hill Where Lionesses Roar [+lire aussi :
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de Luana Bajrami, qui a fait sa première à Cannes et valu à son fascinant trio d'actrices principales le prix de la meilleure interprétation féminine à Sarajevo.

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Ceci étant dit, le dernier ajout en date à ce qu'on peut d’ores et déjà considérer comme une tendance (la "Vague des femmes kosovares" ?) est sans doute le titre le plus riche et le plus accompli de tous : il s'agit de Vera Dreams of the Sea [+lire aussi :
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, le premier long-métrage de Kaltrina Krasniqi, qui vient de faire sa première mondiale dans la section Orizzonti de la Mostra de Venise.

Dans la scène d’ouverture, on voit Vera (incarnée par la comédienne de théâtre Teuta Jegeni Ajdini) qui rêve en plein jour, littéralement, de la mer. L'image des vagues bleues et paresseuses est ensuite remplacée par le visage de cette interprète en langue des signes d'âge moyen, en train de se faire maquiller pour le prochain bulletin de la chaîne de télévision d'information locale. Ce talent rare lui permet de gagner sa vie relativement confortablement, ajoutée à la retraite de son mari, le juge respecté Fatmir (Xhevat Qorraj). Cependant, il est impossible de faire de vraies économies de manière honorable, dans une société aussi vérolée par le crime, de sorte que quand Vera apprend que leur vieille maison, au village, a trouvé un acquéreur, elle peut enfin cesser de se préoccuper pour l'avenir de sa fille Sara, mère célibataire et comédienne (un rôle dont Alketa Sylaj, connue pour Cold November [+lire aussi :
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, livre une interprétation émouvante).

Quand Fatmir se suicide et que Vera le découvre, dans une scène d'une facture très habile, l'intérêt que suscite leur maison monte en flèche. Ce bien, initiament sans valeur, est sur la trajectoire d'une autoroute en projet – un projet gangréné par des scandales pour corruption. Le cousin Ahmet (Astrit Kabashi, vu dans Exile [+lire aussi :
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, Hive et Zana [+lire aussi :
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) prétend que Fatmir lui avait promis de lui offrir cette maison, et Vera se trouve très vite pressée de la céder par une véritable procession de types pas commodes qui la menacent.

Jegeni Ajdini est presque dans tous les plans, et son apparence physique et son interprétation rappellent un peu celle de Nadezhda Markina dans Elena d' Andreï Zviaguintsev. Cependant, contrairement à ce personnage, Vera est une personne sensible, traumatisée et pleine de compassion, mais aussi déterminée et animée par une conception inébranlable de la justice, et Ajdini la dépeint à travers une combinaison fascinante de techniques de jeu subtiles et audacieuses à la fois.

Dans son scénario, l'auteure de théâtre établie Doruntina Basha parvient à assembler les nombreux éléments différents qui composent ce récit pour en faire une histoire captivante et dramatique. Leur effet cumulé produit un tout qui dépasse largement la somme de ses parties. La société patriarcale et la manière dont elle contrôle les femmes est présentée comme une structure séculaire face à laquelle les lois de ce pays jeune et sous-développé ne font pas le poids.

Le motif de la femme qui se fait la voix de ceux qui n’ont pas la parole dans un tel environnement fonctionne comme une métaphore simple, mais puissante, de même que les rêves de mer de Vera – surtout quand ce sont des cauchemars. Tels que les ont montés la réalisatrice et Vladimir Pavlovski, ces segments montrant l'étendue bleu foncé ont un effet tampon pertinent, et psychédélique, entre les scènes qui suivent réalistement le déroulement de l'histoire.

La pièce de théâtre expérimentale, à thème industriel, que Sara joue fait écho au décor : la cheffe-opératrice Sevdije Kastrati (The Marriage, Open Door [+lire aussi :
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, Zana) filme le centre-ville de Pristina comme un labyrinthe congestionné de rues fissurées et trempées par la pluie où il est difficile de naviguer, et sa banlieue, qui ne cesse de s'étendre encore et encore, comme un mélange d'éléments ruraux et industriels.

Vera Dreams of the Sea a été coproduit par les sociétés kosovares Isstra Creative Factory et Vera Films avec Dream Factory (Macédoine du Nord) et Papadhimitri Film Production (Albanie). Les ventes internationales du film sont assurées par Heretic.

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(Traduit de l'anglais)

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