email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

IFFR 2022 Compétition Tiger

Critique : L'Enfant

par 

- Marguerite de Hillerin et Félix Dutilloy-Liégeois abordent cette fiction en costumes sur la complexité des émotions humaines avec un regard contemporain

Critique : L'Enfant
Loïc Corbery et João Arrais dans L'Enfant

Le premier long-métrage de Marguerite de Hillerin et Félix Dutilloy-Liégeois, L'Enfant [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Félix Dutilloy-Liégeois et…
fiche film
]
(A criança), est librement inspiré du conte L'enfant trouvé de Heinrich von Kleist. Le film, qui suit João Arrais dans le rôle de Bela, un orphelin adopté par un couple d'aristocrates franco-portugais, se concentre principalement sur les différentes relations de ce personnage : avec ses parents adoptifs, ses amis, son amoureuse et les gens qui travaillent pour lui et sa famille. Il dépeint les mouvements cinématographiques, avant tout émotionnels et psychologiques, de l’histoire d’un jeune garçon qui semble être à la fois dans un grand moment d'auto-découverte et l'épicentre des dynamiques de toute sa maisonnée. Ces mouvements ne font qu'aller plus en profondeur quand le développement que vont avoir d'autres personnages est également révélé : si on ose à comparer l’approche d’un film à une orange ou un oignon qu'on pèle, c'est justifié dans le cas de ce film. À mesure qu’on se rapproche de tous ces gens, on comprend de mieux en mieux leurs histoires singulières, dans toute leur complexité, ainsi que ce qui se trouve sous la surface.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)
Hot docs EFP inside

L'Enfant, sélectionné à Rotterdam dans le cadre de la compétition Tiger, se passe dans la campagne portugaise au XVIe siècle, à une époque où les traditions religieuses conservatrices du pays étaient dominantes. Et pourtant, on est frappé par l'aspect contemporain du film. Débarrassé de toutes les redondantes enjolivures que contiennent si souvent ce genre de films historiques (à tel point que désormais, on les attend) et qui en font parfois des caricatures lestées par la théâtralité exagérée de leurs dialogues, de leur photographie et de leurs décors, ce long-métrage nous permet de vraiment établir un lien avec ses personnages, brillamment interprétés par tous les comédiens. Ainsi, on appréhende le contexte historique et social du film de manière plus naturelle, plus familière, tout en appréciant aussi les atours très joliment conçus que porte chaque personnage. La démarche des auteurs évite aussi d'adopter un regard typiquement hétéronormatif et monogame. Les parents adoptifs de Bela ont une relation polyamoureuse : le père de Bela a ouvertement une liaison avec son ami Jacques et sa mère est émotionnellement subuguée par un fantôme du passé. Le fait que le personnage principal soit un garçon cis dont le nom est calqué sur le féminin du mot portugais pour "beau" peut être vu comme un petit détail supplémentaire qui s'ajoute (même si c'est très léger) à cette position non-conformiste des plus plaisantes.

On peut aussi sentir dans ce film une compréhension profonde de la manière dont les espaces, les lumières et la photographie peuvent inévitablement enrichir un film. Chaque frontière physique est chargée d’un sentiment de séparation entre ce qui est idéalisé et inconnu et ce qui est "vrai" et à découvert. Même si la palette de certains extérieurs diurnes semble manquer un peu de tendresse et de chaleur, la nuit, on a devant les yeux des images esthétiquement sidérantes. Le réseau des intrigues devient de plus en plus enchevêtré au fil du film et grâce à un montage propre et bien conçu, celui-ci parvient non seulement à montrer comment se forment ces noeuds compiiqués, mais aussi à souligner à quel point vivre, être humain, peut parfois se décrire exactement comme cela : comme un mélange constant d’émotions.

Dans le paradis isolé où se passe le film, les réalisateurs se rapprochent petit à petit, avec la lenteur qui sied, de leurs personnages, de manière à composer un portrait Inattendu, troublant, très beau : celui d'une famille, et de l'amour, mais aussi du malentendu, du chagrin, du deuil et surtout de la tragédie, qui semble prévaloir, comme inévitablement. Il ne saurait y avoir de dénouement heureux dans ce film (ou dans la vie), juste un flux humain, sublime, de rencontres et de moments où l'on apprend à exister, pour le meilleur et pour le pire.

L'Enfant a été produit par Leopardo Filmes en coproduction avec Alfama Films et avec le soutien financier de l'ICA, du Ministère de la Culture portugais et de la RTP.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy