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VISIONS DU RÉEL 2022 Burning Lights

Critique : Herbaria

par 

- Cet essai documentaire très tactile par Leandro Listorti établit un lien convaincant entre préservation des plantes et gestion des archives filmiques

Critique : Herbaria

Herbaria de Leandro Listorti, gagnant du Prix du Jury Société des Hôteliers de la Côte dans le cadre de la compétition Burning Lights de Visions du Réel (lire l'article), traite de la préservation de matériaux délicats, à savoir les plantes et les pellicules en celluloïde, et du lien entre les deux. Fidèle à son thème, le deuxième long-métrage documentaire de l’archiviste, programmateur de festival et réalisateur argentin se présente comme une exploration tactile, formulée comme un film-essai, tournée en 16 et en 35 mm et combinée avec des images d’archives datant de différentes périodes.

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Le film s’ouvre sur un segment botanique : des personnes marchent dans un bois et l'une d'elles cueille une fleur pour la ranger soigneusement entre les pages de son herbier. Listorti documentaire l'opération avec la même méticulosité, en se concentrant sur les mains de la dame qui préserve ainsi la plante.

Suivent des segments tournés dans des musées de botanique ainsi que dans des lieux de conservation d'archives filmiques qui établissent nettement la mise en parallèle des deux univers. Comme le celluloïde, les plantes sont conservées dans des boîtes en métal hermétiques, et un expert allemand explique quelles sont les bonnes conditions pour conserver les négatifs et les films développés avec pour toile de fond des placards en bois qui contiennent en fait des plantes. Un vieux film sur la nature décrivant des spirographes et des anémones de mer apparaît dans les premiers moments du documentaire et vers la fin. Un autre expert explique combien les films sont vulnérables aux moisissures, du fait de la gélatine qui en couvre la surface. On voit un vieux film ainsi abîmé, qui s’est désintégré pendant sa restauration, ce qui signifie que c’est la dernière fois que ces images seront vues sous leur forme originelle.

À mesure que le documentaire avance, Listorti établit de plus en plus de liens entre les deux parties de son sujet. L'élément éphémère de la pellicule se laisse facilement connecter aux changements qui affectent le monde naturel, les deux étant liés aux cycles saisonniers de la nature et à ceux qui viennent des humains. Bien que les plantes n’aient pas été conservées spécifiquement à ces fins au départ, elles aident à présent à comprendre l'effet que nous avons eu sur la planète.

Depuis 1750, plus de 500 espèces de plantes se sont éteintes – soit plus que tous les oiseaux, amphibiens et mammifères réunis. Des botanistes recréent l'allure qu'elles avaient à partir de ces spécimens recueillis et mis à sécher, or le travail de restauration des films est présenté comme assez similaire. Le réalisateur étaie son propos en faisant contraster les images avec des interviews en voix off d'experts dont aucun (sauf la pionnière germano-argentine du cinéma expérimental Narcisa Hirsch) ne sont nommés à l’écran avant le générique de fin : des professionnels du film parlent pendant qu’on voit des images de plantes, des botanistes pendant que défilent des images d'archivistes traitant des pellicules.

Le réalisateur pimente aussi son film de quelques connexions historiques, comme le fait que le plus grand botaniste d'Argentine au début du XXe siècle était le grand-père du propriétaire d'une des plus grandes collections de projecteurs au monde. Mais au-delà des faits, des anecdotes et des opinions professionnelles qu'il présente, là où Herbaria se distingue, c'est dans sa manière d'obtenir une unité de temps et d’espace. Bien que le documentaire ait été tourné entre Berlin, Buenos Aires et New York, on a l'impression que tout se passe dans une seule zone limitée, grâce au montage de Listorti et aux textures spécifiques du 16 et du 35 mm – qui rendent aussi difficile de distinguer, par moments, le matériel d’archives de ce qui a été tourné spécialement pour le film. Cela donne au film quelque chose d'actuel, surtout juxtaposé avec des références historiques spécifiques. Le monde naturel ne fait qu'un, nous dit Herbaria, et l’histoire du cinéma n’est pas linéaire, mais aussi cyclique que la nature.

Herbaria a été coproduit par MaravillaCine (Argentine) et WeltFilm (Allemagne). Les ventes internationales du film sont gérées par la société lisboète Kino Rebelde.

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(Traduit de l'anglais)

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