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VALENCE 2022

Critique : Vasil

par 

- Dans son premier long-métrage, Avelina Prat explore la subtile relation entre deux inconnus et parvient à analyser des sentiments plus profonds que la simple empathie

Critique : Vasil
Karra Elejalde et Ivan Barnev dans Vasil

Partager avec les autres quand on possède plus que ce dont on a besoin n’est pas la même chose que partager son humble lot avec autrui. Dans les sociétés développées où nous avons beaucoup trop de choses, répartir un peu mieux les biens n’est pas réellement un sacrifice : c’est même plutôt une procédure qui scelle notre statut de citoyens dotés d'une conscience sans nécessairement requérir d'investissement émotionnel. Être empathique est déjà presque une directive, et de fait, on s'exécute comme si on s'acquittait d'une obligation. En d’autres termes, pour se rapprocher plus concrètement de la trame de Vasil [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Avelina Prat
fiche film
]
, on peut héberger un sans-abri chez soi  pendant quelques temps, mais cela ne veut pas dire qu’on va s’intéresser à cette personne. Être compréhensif par rapport au destin individuel d'autrui serait-il une mission impossible ?

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L’examen détaillé des interactions humaines que propose le premier long-métrage d’Avelina Prat pose cette question, et quelques autres encore. Le film a fait sa première mondiale au Festival de Varsovie, vient de participer à la Seminci et à la Mostra de Valencia, et va enfin arriver sur les écrans espagnols le 4 novembre, distribué par Filmax.

Prat recommence le récit presque de but en blanc et présente au spectateur l'endroit précis où a commencé l'histoire vraie dont s'inspire le scénario, une histoire que la réalisatrice a entendu de la bouche de son père et transposé sur le grand écran. Dans la première scène, Alfredo (Karra Elejalde) est au téléphone avec sa fille (Alexandra Jiménez) et lui parle de l'immigrant bulgare Vasil (Ivan Barnev), qui occupe temporairement le canapé de son salon jusqu’à l'obtention d'un permis de séjour qui lui permettra de trouver du travail et un endroit où vivre. Ce service lui a été demandé par son amie Maureen (Sue Flack), une Irlandaise bourge qui vit depuis de nombreuses années en Espagne, parce que Vasil n’est pas n’importe qui : c’est le meilleur joueur de bridge de son club, où tout le monde le veut dans son équipe et tolère (pour le moment en tout cas) son statut social inférieur uniquement parce qu’il a du talent. Bien qu’il passe ses journées à demander sans succès de aides à l'administration, Vasil n'est pas non plus l’étranger désespéré classique, et il ne sacrifierait pour rien au monde une partie de bridge à un cours offert par le pôle emploi. Son attitude bohème par rapport à la vie irrite Alfredo, bien qu’il adore jouer aux échecs avec lui. En revanche, sa fille veut en savoir plus sur lui et sur son pays, contrairement à son père, qui n’est pas très curieux de son "locataire".

Prat formule ici une critique de la société espagnole, exposant sa mentalité fermée et sa vision limitée du monde, spécialement au sein de la classe bourgeoise, mais le sujet des interactions humaines est aussi universel et une conclusion évidente à ce discours est que les mondes culturels et individuels restent étrangers les uns aux autres, y compris quand ils sont proches : Vasil vient d'un pays européen et pas si lointain de l'Espagne, mais inexploré ; le père et la fille ont des liens de sang, mais ils se connaissent mal. Contrairement à ce qu'il pourrait laisser penser en surface, Vasil n’est pas une dénonciation des préjugés sur les immigrés, mais un portrait de chacun des personnages comme un univers solitaire qui a du mal à se connecter avec les autres.

Elejalde et Barnev dans les rôles principaux ont bien mérité le prix d'interprétation masculine qu'ils ont partagé à la Seminci pour la manière très naturelle dont ils rendent les nuances très fines de la communication entre deux personnes qui représentent des univers opposés. Les nombreuses scènes d'intérieur et les tons chauds de l’image contribuent à doter le film d'une atmosphère intime en accord avec la trame, qui touche aux fibres les plus délicates des relations humaines.

Vasil est une coproduction entre l’Espagne et la Bulgarie qui a réuni les efforts de Distinto Films, Activist38 et Diferente Films AIE. Les ventes internationales du film sont gérées par Filmax.

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(Traduit de l'espagnol)

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