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TRIESTE SCIENCE+FICTION 2022

Critique : Piove

par 

- Ce film d’horreur italo-belge par Paolo Strippoli est un film post-pandémie qui pousse à l’extrême les peurs, la colère et les tensions sociales amplifiées par les réseaux sociaux

Critique : Piove
Fabrizio Rongione in Piove

Il y a quelque chose de néfaste et toxique dans les égouts de Rome, la "Cloaca Maxima" de l’Antiquité, encore en fonction après plus de 2500 ans, dans le film Piove [+lire aussi :
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de Paolo Strippoli qui, après être passé à plusieurs festivals spécialisés dans le fantastique (Austin, Strasbourg, Sitges, Curtas, Brooklyn), a fait sa première italienne dans la section Alice nella città de la Fête du Cinéma de Rome et a été invité au Festival Science+Fiction Trieste.

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Une effluve qui empoisonne l’esprit, déchaîne les instincts les plus violents et contamine même la famille Morel. Le père Thomas (joué par le Belge Fabrizio Rongione) est un homme au passé brillant qui est devenu un individu éteint, comme vidé, qui survit d'un petit boulot à l'autre et s'occupe de sa petite Barbara (Aurora Menenti), qui ne peut plus se servir de ses jambes. Le fils aîné, Enrico (Francesco Gheghi), est un adolescent rebelle qui a des attitudes provocatrices et autodestructrices. Père et fils s’accusent l'un l'autre quelque chose de dramatique qui est survenu dans le passé, et que le réalisateur nous fera découvrir à travers un long flashback peu avant la fin, au moment où leur famille vivait heureuse autour de la maman, Cristina (Cristiana DellAnna). Du reste, les conflits et explosions de colère se multiplient dans l’immeuble, dans la rue, au supermarché, dans toute la ville, bien filmée dans des tons sombres et avec des optiques anamorphiques par Cristiano di Nicola, et rendue inquiétante par les musiques de Raf Keunen.

Divisé en chapitres qui font allusion au cycle de l’eau (évaporation, condensation, précipitation...), le deuxième long-métrage de Strippoli (après le film Netflix A Classic Horror Story [+lire aussi :
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, coréalisé avec Roberto De Feo), qui opère un virage net vers le gore dans sa deuxième partie, est "un film d'horreur des sentiments", pour reprendre la formule choisie en 2017 par le jury du Prix Franco Solinas en récompensant son scénario, alors signé par Jacopo Del Giudice, 27 ans. Le scénario a ensuite été récrit plusieurs fois, et aujourd’hui, il porte les signatures de Del Giudice, du réalisateur et de Gustavo Hernandez.

"Film d'horreur des sentiments" est la description la plus appropriée en effet pour qualifier cette tendance récente qu'on, note aussi dans le cinéma italien, à hybrider un cinéma qui observe la société avec le cinéma de genre. Quelques jeunes scénaristes et réalisateurs sont en train d’apprendre à utiliser les codes de l’épouvante (ou du western, ou du fantastique) pour développer un propos symbolique sur le regard contemporain. Ils ont recours au cinéma de genre pour esquiver un cinéma d’auteur devenu de plus en plus autoréférentiel. De la même manière que les ancêtres des zombies de George A. Romero réfléchissaient sur le racisme, le capitalisme et le consumérisme, ou qu'aujourd’hui Jordan Peele critique à travers l’horreur le libéralisme américain (Get Out) et les dangers de l’entertainment (Nope), dans l'après-Covid, on peut développer sur toutes les peurs possibles dans une société perturbée par des pandémies, des menaces de guerre nucléaire et des alertes écologiques. Piove est, à son échelle, un film dont l'angle post-pandémique est évident dans sa manière de pousser à l’extrême les tensions nées des obligations et restrictions, amplifiées par la toile de fond constante et anxiogène des réseaux sociaux. Il ne pouvait que s’inscrire dans le champ de l’horreur. Dans une note, le réalisateur explicite ce rapport avec le présent : "Le Rome de Piove est constamment sur le point d’exploser, et il n’est pas si lointain du Rome réel. Il suffit de faire la queue au supermarché ou à la poste, d'être dans les embouteillages ou dans un bus trop plein pour sentir la rage ramper parmi les gens. C’est la même rage qui alimente les pires déclinaisons politiques d’aujourd’hui, qui donne lieu aux défoulements les plus crasses sur les réseaux sociaux, qui nous rend plus de plus en plus individualistes".

Piove est une coproduction entre l’Italie et la Belgique pilotée par  Propaganda Italia, en association avec Polifemo et GapBusters. Le film sortira en Italie le 10 novembre, distribué par Fandango. Les ventes internationales du film sont gérées par Rai Com.

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(Traduit de l'italien)

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