29/03/2023 - Cette pièce de chambre palpitante réalisée par Michal Vinik, dont l’action se passe en une journée, scrute l’hypocrisie sociale et les luttes de pouvoir en jeu dans un mariage arrangé

Une jeune femme ukrainienne, Valeria (Dasha Tvoronovich), semble vivre un mélange d’excitation et d’angoisse. Elle arrive à Tel-Aviv pour rencontrer son futur mari, Eytan (Avraham Shalom Levi), qu’elle n’a vu que trois fois sur Skype et qu’elle va épouser dans le cadre d’un mariage arrangé. Sur place, elle retrouve sa sœur Christina (Lena Fraifeld), qui vit en Israël depuis un certain temps déjà, et qui a rencontré son mari Michael (Yaakov Zada-Daniel) par le truchement d’un arrangement similaire.

Voici la prémisse intrigante de Valeria Is Getting Married de Michal Vinik, projeté dans la section Panorama du Festival international de Vilnius après avoir fait sa première mondiale l’année dernière à la Mostra de Venise.

Ce film peut être décrit comme une exquise pièce de chambre, puisque l’action se déroule sur une seule journée et presque exclusivement dans un seul lieu (entre les murs de la maison de Cristina). Sa structure elle-même est assez traditionnelle : c’est un récit en trois actes, où les trois personnages principaux sont pris dans des conflits extrêmement clairs. Non que le film de Vinik soit banal ou du déjà vu. Au contraire, ce qui le rend plutôt unique et captivant, c’est son cadre et son sujet insolite, celui des mariages arrangés entre les gens de ces deux cultures, et le fait que les trois personnages principaux essaient d’obtenir un gain personnel à travers des actes condamnables, en se comportant égoïstement et en faisant du mal (dans une certaine mesure) aux autres et à eux-mêmes.

Par exemple, Christina ne veut pas renoncer à son style de vie opulent, mais elle a clairement du mal à tolérer les remarques continuelles de Michael sur ce qu’elle fait et son attitude condescendante. De son côté, Michael semble fier d’avoir une femme qu’il peut contrôler à tous les niveaux et il a bien envie de gagner la somme conséquente que va lui donner Eytan pour l’arrangement de son mariage avec Valeria. Sauf qu’il sent aussi que “finaliser” leur réunion pourrait être plus difficile que prévu, et craint que Valeria ne soit une bombe à retardement.

À travers plusieurs détails de l’intrigue apparemment insignifiants, on sent à quel point la relation qu’a le couple depuis longtemps (voire, plus probablement, depuis le tout premier jour) a été lourdement influencée par la poigne de Michael. Dans une des premières scènes, par exemple, Michael trouve la soupe de Christina insipide par rapport à celle de sa mère, mais quelques temps plus tard, on se rend compte que le plat qu’elle a cuisiné n’avait probablement rien de mal, car Christina assure qu’elle a suivi méticuleusement la recette de sa belle-mère.

À force de demander toujours davantage de sa femme et de la diminuer, Michael finit par accumuler une énorme pression sur elle, ce qui lui permet de garder le contrôle et d’étouffer tout possible désir d’indépendance qu’elle aurait. Ainsi, Valeria Is Getting Married se mue progressivement en une sorte de jeu de chat et de la souris psychologique où personne ne semble disposé à accepter de reconnaître qui il/elle est vraiment et où personne ne comprend comment obtenir la liberté ou parvenir à quelque forme d’accomplissement personnel que ce soit. Et les degrés variables de désespoir visible et d’égotisme en jeu ne font qu’exacerber les choses.

Le récit, rapide, contenu dans 76 minutes de durée, est enrichi par la présence bien équilibrée de la musique de Daphna Keenan, dominée par les violons, qui comprend de plus en plus de motifs mélancoliques et une pulsation qui sourd de plus en plus tandis que la tension monte.

Valeria Is Getting Married a été coproduit par ForeFilms (Ukraine) et Lama Films (Israël). Les ventes internationales du film sont assurées par l’agence allemande m-appeal.

(Traduit de l'anglais)