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CANNES 2005 Compétition Officielle

Wenders frappe à la porte de l’Amérique

par 

"Entrez sans frapper" ("Don't come knocking") voit-on écrit sur un petit écriteau accroché à la caravane de l’acteur Howard Spence (interprété par Sam Shepard) sur le plateau de tournage d’un western au beau milieu de la Monumental Valley. Et pourtant ce sera lui, star de cinéma déchue, qui plaquera tout et s’enfuira (à cheval, bien entendu) pour aller frapper à la porte de son passé.
Nous découvrons très vite que Howard a jusque là mené une vie qu’un puritain définirait de débauche: alcool, drogue, femmes, orgies, casino, bagarres, scandales de tout genre. En se réfugiant chez une mère plus distraite que protectrice, Howard apprend qu’il a un enfant, né d’une très vieille relation. C’est exactement ce qui se passe dans le film de Jarmush (Breaking Flowers), lui aussi en compétition à Cannes. Pour redonner, ou peut être donner pour la première fois un sens à son existence, Howard Spence part à la recherche de cette femme qu’il a abandonné (Jessica Lange, mariée à l'acteur depuis 23 ans dans la vie) et de son fils d’une vingtaine d’années.

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Wenders est de retour à Cannes : il y est venu pour la première fois en 1976 présenté Au fil du temps et a fait depuis neuf apparitions dont l'une en tant que Président du Jury. Vingt ans après la Palme d’or que lui a valu Paris Texas, le revoilà avec un film longuement réfléchi, dont le scénario co-écrit avec Sam Shepard, a demandé trois ans de travail. Les ressemblances avec Paris, Texas sont nombreuses et ceux qui verront Don't come knocking [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
retrouveront surtout l'immense beauté du désert (sans parler de celle de l'humain).
La photographie et la mise en scène du film sont sensationnelles et confirment le talent du grand cinéaste allemand. Grands panoramas et plans larges, paysages ruraux et urbains aux couleurs intenses, édifices d’époque aux couleurs brunes et chaudes typiques des villages américains qui évoquent les toiles de Edward Hopper, artiste à qui Wenders doit beaucoup.
Dans ces endroits qui font partie de notre imaginaire depuis maintenant cent ans, depuis que le cinéma est né, Wenders fait évoluer ses personnages tourmentés. Le cow-boy en fuite comme Jessie James, au comportement autodestructif à l'image du parfait antihéros, incarne un homme moderne dépouillé de toutes responsabilités, et qui, à l’âge adulte, décide d’affronter la culpabilité. Wenders et Shepard focalisent l'attention du spectateur sur le thème de la désagrégation de la famille et Shepard s’implique au point de prêter aussi son beau visage dur, brûlé par le soleil et profondément ridé, qui sera repoussé par une femme qui l’a aimé mais qui ne peut peut-être plus lui pardonner.

Wenders refuse de donner son interprétation politique du film, mais les lectures sont nombreuses et sous le thème typiquement familial, explose celui de la crise des Etats-Unis et de tout l’occident. Et le film dont Sam Shepard s'échappe s'appelle Le fantôme de l’Ouest, cet Ouest devenu un Occident qui ne veut pas changer, ne veut pas reconnaître ses erreurs et qui se referme de plus en plus sur lui-même, comme l’assureur, personnage symbolique, qui poursuit le protagoniste, interprété par Tim Roth, et qui pontifie "rien n’a changé depuis le temps de l’Inquisition". En y réfléchissant bien, quelque chose a changé : personne ne tourne plus de westerns. La grande illusion du passé est devenue la grande désillusion d’aujourd’hui. Ce n’est pas pour rien que la plaisanterie la plus symbolique est celle de l’angélique Sarah Polley, "Je préfère le cinéma à la vie réelle". Nous aussi parfois.

* Don't come knocknig est produit par Reverse Angle Production et coproduit par Arte France Cinéma, Paradis Films et Océan Films (qui le distribue). La vente est confiée à Hanway Films de Jeremy Thomas.

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(Traduit de l'italien)

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