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Les prix Goyas 2003

par 

- Une cérémonie de remise de prix à l’instar du ‘non à la guerre’. La chronique de la soirée entre glamour et dénonciations politiques.

Tous unis contre la guerre

Regardez aussi l'l'interview vidéo à Aitana Sánchez-Gijón


Cela n’arrive pas souvent d’assister à une remise des prix aussi riche en émotions et en sincérité comme celle de la 18e édition des Prix Goya, transmisse en direct par la TVE 1, et peu de fois un événement de ce genre a déclanché autant de polémiques.
A un horaire de grande écoute, les protagonistes du cinéma espagnol ont montré leur aspect le plus humain et le plus proche aux spectateurs qui veulent croire en eux et rêver avec eux.

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Le président de l’Académie, Marisa Paredes, élégante et très belle dans une robe du soir vert émeraude, a donné la bienvenue en affirmant qu’il s’agissait d’une soirée libre, la soirée du cinéma espagnol, des Prix Goya.
«Il ne faut pas avoir peur de la culture, du dialogue, ni de la liberté d’expression et encore moins de la satyre, de l’humour. Il faut avoir peur de l’ignorance et du dogmatisme, il faut avoir peur de la guerre».
Le public a applaudi avec enthousiasme et sincérité, le spectateur s’est rendu compte qu’il allait assister à une cérémonie riche en contenus sociaux.
«Une autre raison pour se relaxer – a continué le Président – est que je ne parlerai pas de la crise, nous sommes ici pour fêter le cinéma espagnol, de l’intérêt qu’il suscite en Espagne et ailleurs dans le monde. Dans notre cinéma il y a du talent, de la créativité, de l’illusion. Pas d’argent, mais cela peut se résoudre avec l’accord de tous. Nous sommes autocritiques et notre cinéma commet des erreurs, comme les autres dans le monde entier. Il y a des bons et de mauvais films et il y a aussi des miracles malgré les productions hollywoodiennes (…) Mais le bon cinéma nous plait, peu importe d’où il vient! On a besoin de relations communes, pas d’invasion, on a besoin d’une liberté d’expression, on a besoin d’être compétitif dans des conditions d’égalité. L’Espagne est un pays avec un long passé, plusieurs identités, avec la richesse de plusieurs langues, et qui partage avec l’Amérique Latine son exceptionnelle culture; essayons de nous mettre d’accord et de défendre notre cinéma».
Le moment n’était pas favorable pour parler de la crise qui nécessite des interventions concrètes de la part du gouvernement et non pas de simples discours, comme cela arrive souvent. C’était la fête du cinéma espagnol, et peu de fois, comme dans cette édition, la bonne qualité de ce cinéma se lisait déjà dans les titres nommés et mettait même d’accord les critiques.
Le Président a conclu avec une boutade en demandant une cigarette: «j’ai promis d’arrêter de fumer si on trouvera une solution au problème du cinéma».

La parole aux gagnants

Le spectacle commence avec une musique du cirque, à la Kusturika, grâce à la compagnie du Théâtre Animalier, auteurs et coordinateurs du spectacle avec le scénario de Juan Cavestany et les acteurs Guillermo Toledo et Alberto San Juan dans le rôle de présentateurs. Tous montrent avec orgueil sur leur habit de gala le badge contre le conflit avec l’inscription ‘Non à la guerre’.

Javier Bardem, qui, avec Juan Carlo Bellido, a remis à la chanteuse Lolita le prix de la meilleure jeune espoir féminin pour le film Rencor, affirme que le gala aura «beaucoup de charme et de prestige».
A’ partir de cet instant, tous commencent à manifester librement leur engagement politique et social au moment où il est nécessaire de le faire.

José Angel Egido, prix du meilleur jeune espoir masculin pour Los lunes al sol [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
, affirme : «je veux rappeler à la mémoire toutes les personnes qui luttent contre les tâches, qu’elles soient de sang ou de l’information. Nunca mai alla guerra».
Le Goya du meilleur documentaire a été remis à Pedro Joan Ventura pour El efecto Iguazù, une œuvre sur la grève à outrance des travailleurs de Sintel. Les ouvriers de cette entreprise sont montés sur l’estrade avec le réalisateur pour remercier le monde du cinéma de sa solidarité et dénoncer le fait qu’il s’agit d’un travail solitaire que personne n’a voulu financer, solitaire comme ses interprètes trahis par les fausses promesses que le gouvernement et la Telefònica leur avait fait et qui n’ont pas maintenues.

L’émotion grandit, on parle sans fausse rhétorique de chômeurs, de victimes. Et le ministre de la culture, Pilar del Castillo, ne donne pas l’impression de s’amuser.

Luis Tosar, prix du meilleur second rôle masculin, suggère au président Aznar d’aller sur la côte nord de l’Espagne et non pas en Irak, s’il a besoin de pétrole.

Julio Wallowits et Roger Gual réalisateurs de Smoking room, autre dénonciation sur le monde du travail et prix du meilleur scénario révélation s’écrient: ‘Guerre à la guerre’, et rappellent comment plusieurs producteurs aient refusé d’investir dans leur œuvre.

Mercedes Sampietro, Goya de la meilleure actrice pour Lugares comunes, se rappelle de l’Argentine et en général de «ceux qui souffrent l’ignominie à cause de l’indécence politique». Dans la salle un cri s’élève ‘Non à la guerre’. Tous les spectateurs se lèvent pour applaudir chaleureusement Manuel Alexandre, Goya d’honneur.

Javier Bardem, prix du meilleur acteur (Los lunes al sol) revient sur scène et affirme que gagner les élections ne signifie pas avoir un chèque en blanc. «Il faut écouter le peuple, les gens qui disent ‘Non à la guerre’» (selon les sondages, 80 pour cent de la population est contraire à la guerre) et il envoie un message d’espoir aux chômeurs, parce que, en reprenant les mots de Claudio Rodriguez: «On peut être chômeur mais pas apprivoisé».

Derniers prix: celui attribué à Fernando Leòn, meilleur réalisateur (Lunes al sol) protagoniste absolu de la soirée, remis par Penelope Cruz, habillée par Chanel, e Amenàbar, tous les deux avec le badge pacifiste. réalisateur dédie ce prix aux héros à qui on refuse l’accès de leur futur et conclut, après avoir montré son badge, «j’espère qu’un jour on pourra parler de la crise de l’industrie des armes».

Enfin le Goya pour le meilleur film est allé à son producteur Elias Querejeta (Elias Querejeta Producciones et MediaPro Group) qui souligne comment Los lunes al sol parle d’amour, de mélancolie, de solidarité. «Si l’un de nous tombe nous tombons tous. Réfléchissons et faisons en sorte que le XXI siècle ne devienne pas un siècle terrible».

La fête continue, il y a de la gaîté sur scène et dans le coulisses, Juan Cavestany est orgueilleux du résultat: «Il y a eu une réponse spontanée de la part du public; nous, ceux qui était dans le parterre et ceux qui ont reçu le prix Goya nous nous nourrissions l’un de l’autre».
Mais ceci n’a pas plu à madame la ministre Pilar del Castillo, qui au cours d’un débat à la radio avec Guillermo Toledo a accusé le cinéma espagnol d’être le bras armé de l’opposition.
Le Président de l’Association des Producteurs, Eduardo Campoy, en est même arrivé à demander les démissions de Marisa Paredes, mais entre-temps les protagonistes du cinéma et du spectacle en général continuent de manifester leur désaccord avec la politique du gouvernement. Goya, à qui sont dédiés les prix, aurait dit «le sommeil de la raison engendre des monstres».

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